Ce troisième Bond sous l’aire Craig, décidément le meilleur interprète de 007 avec Sean Connery, est le retour jubilatoire aux fondamentaux de la saga, des personnages phares (Q, miss Moneypenny) aux gadgets et véhicules (le Walter PPK version 5.1.1, l’Aston Martin DB5) en passant par quelques brins d’humour. De plus un James Bond qui se respecte se doit de présenter un méchant redoutable : Javier Bardem compose un bad guy d’anthologie, hacker péroxydé très dérangé entre le Joker et Max Zorin.
Tous les ingrédients d’un Bond réussi ont été réunis dans un shaker manipulé avec un grand professionnalisme par Sam Mendes. Le résultat tient de l’excellence. Bon anniversaire, Mr Bond.
Deux écoles, plusieurs avis. James Bond couvre près de 50 années de cinématographie et à su (dû) évoluer avec son temps. Il y a bien sûr les puristes, ceux qui le sont moins, ceux qui préfèrent telle époque, tel interprète ou le ton emprunté. En somme, James Bond on l’apprécie version old school ou version moderne.
Et comme 50 ans cela se fête (il paraît) les producteurs ont décidé de franchir le virage entamé avec Casino Royale. James Bond n’est plus et (re)naît.
Exit les gadgets qui faisaient le charme et la marque 007 des années passées, l’agent secret le plus populaire est (définie comme) moderne et n’a plus besoin d’une flopée de matériel (à la limite du gaguesque parfois) pour se sortir de situations périlleuses. Les James Bond girls sont également moins présentes qu’à l’accoutumé.
Cette proposition doit être acceptée afin de prendre toute la largesse des changements effectués sur cette nouvelle version de 007.
Pour ce changement radical, les producteurs, Barbara Broccoli et Michael G. Wilson, proposent du choix bienvenu et malin de Sam Mendes.
Le réalisateur a su dans un équilibre précis amener sa touche personnelle et respecter un univers ancré depuis 50 ans, tout en le modernisant avec respect. Rares sont les réalisateurs actuels qui savent apporter un découpage et une mise en scène soignée et non clippesque à des films d’actions. À cela s’ajoute la mise en scène théâtrale (Mendes est également un grand metteur en scène de pièces, notamment Shakespeare) des séquences où la dramaturgie prend plus de place.
C’est au travers ce doux mélange de classicisme et de modernisme tant sur le fond que dans la forme que le réalisateur réussit le pari de donner un nouvel élan à James Bond. Sans jamais oublier les origines du mythe, Mendes armé d’un scénario faisant la part belle aux hommages et références des 22 épisodes précédents, remodèle enfin, en lien avec son époque, les contours d’un personnage qui ces dernières années (hormis Casino Royale) n’avait pas su ce renouveler ou jouer de ses propres clichés. Ici tout est rassemblé pour un spectacle multicarte et totalement respectueux de ses origines.
Daniel Craig s’adonne à une parfaite interprétation quand Javier Bardem s’autorise à jouer dans les eaux troubles d’un jeu exagéré mais terriblement délicieux.
Certains pourraient reprocher un final peut-être trop « shakespearien » (voire Freudien ? dans un James bond !?), mais cela apparaît au final comme quasi nécessaire pour un renouvellement total de l’œuvre.
Même le générique début en sus de sa qualité formelle nous donne à écouter un titre (ici, Adele) d’une qualité très rarement égalée dans les derniers chapitres.
Rares sont les franchises qui, usées jusqu’à l’os, savent se renouveler, Skyfall en fait désormais partie. Il reste maintenant à savoir si cet élan pourra être soutenu tant la solidité de l’entreprise repose sur le fond même de ce qu’on fait subir au héros. Une renaissance dans ses plus hautes formes, une confirmation quant au devenir ? Toujours est-il qu’une promesse vient d’être faite.