Helen traverse une passe douloureuse de son existence. Elle rencontre Bobby et s’éprend de lui, un jeune drogué qui lui redonne un goût de la vie qu’elle ne possédait plus. Mais Needle Park, haut lieu du trafic de drogue new-yorkais, n’engendre que détresse ou désespoir…
Avis de Fabien
Deuxième film de Jerry Schatzberg après Portrait d’une enfant déchue (1970) et premier grand rôle pour Al Pacino, Panique à Needle Park raconte la descente aux enfer d’un couple de junkie à New-York.
D’une grande exigence et maîtrise, le film montre de manière frontale et clinique comment le manque conduit aux pires comportements pour se procurer une dose : mensonge, vol, prostitution. Avec pour conséquences la déchéance physique et sociale, la mort ou la prison. Il a la forme d’un redoutable témoignage où la drogue contrôle la vie, les attitudes et comportements d’addicts, de personnages malades.
La mis en scène de Jerry Schatzberg est sans concessions, sans effets superflus visuels ou sonores; on est donc loin du maniérisme de Requiem for a dream par exemple, plus proche du néo-réalisme ou du cinéma-vérité d’un John Cassavetes et son habileté à faire rentrer la vie dans ses fictions. Son Panique à Needle Park est ainsi proche du documentaire : caméra à l’épaule, longs plans, gros plans redoutables lors des séquences de prise de drogue dans des hôtels de passe. Jerry Schatzberg filme au plus près des visages et des corps, ne juge pas ses personnages et les accompagnent (avec regard compassionnel) dans leur parcours, les trips où l’euphorie laisse vite la place à la douleur, les déchirements et disputes homériques suivies de retrouvailles fragiles, les espérances d’une vie rangée à la campagne vite déçues. Leur addiction à la drogue aura-t-elle raison de leur histoire d’amour?
New-York est un personnage principal du film, le Needle Park du titre, Harlem avec une superbe séquence de base-ball de rue où Pacino se rend compte que sa copine est tombée dans la drogue (la surprise et la déception traduits de manière troublante par le regard intense de l’acteur) et ces moments volés dans les rues de N-Y où acteurs, figurants et passants se mêlent pour un réalisme accru.
Al Pacino et Kitty Winn (Prix d’interprétation à Cannes en 71) sont sidérants. Pacino connaîtra juste après la consécration avec Le Parrain. Panique à Needle Park est un des films marquants des années 70 sur la drogue, par son côté réaliste et son interprétation majuscule.
Test blu-ray
Technique
Cette nouvelle copie a été tirée d’un master haute définition 2K restauré supervisé par Jerry Schatzberg. Le master est nickel, avec un rendu argentique (granulation mesurée) raccord avec l’esprit documentaire du film. La VO s’impose de loin avec un meilleur rendu des ambiances captées à N-Y.
Bonus
Carlotta propose ce coffret de prestige dans le cadre de sa série Collection Coffrets Ultra Collector. Ce troisième coffret est une édition limitée et numérotée à 2 000 exemplaires avec un visuel exclusif créé par Telegramme. Sont inclus le blu-ray, le DVD et un superbe livre « La vie sur grand écran » incluant 50 photos inédites, interviews, extraits du scénario (200 pages).
La section bonus inclut tout d’abord 5 scènes commentées par Jerry Schatzberg (21′) où le réalisateur revient sur un tournage en liberté dans les rues de New-York avec figurants mêlés aux passants, beaucoup d’improvisation, le recours à une caméra à l’épaule pour des séquences comme celle de l’overdose pas chorégraphiée. Il loue la puissance de jeu d’Al Pacino, son courage dans ses prises de risques pour s’immerger dans un rôle.
Puis sont proposés 4 modules d’interviews, passionnants :
« Jerry photographe » (17′) : avant Panique à Needle Park, les débuts de Jerry Schatzberg en tant que photographe, reconnu comme l’un des plus grands de l’univers de la mode, du cinéma et de la musique; il a travaillé pour beaucoup de magazines prestigieux comme Vogue, Life et shooté des personnalités comme Fidel Castro et les Stones.
« Jerry cinéaste » (21′) : Jerry Schatzberg revient sur la genèse et le tournage de Panique à Needle Park. Il a commencé par des pubs avant de réaliser son premier film Portrait d’un enfant déchu avec Faye Dunaway. Pour Panic, adapté d’un livre, il a voulu qu’il soit « le plus proche possible du documentaire, au téléobjectif ». Le but était de « donner au film une sensation de claustrophobie avec des gros plans ». Pour la préparation le réalisateur a côtoyé avec Al Pacino des junkies, des psys.
« Al & Jerry » (9′) : Jerry Schatzberg revient sur sa collaboration avec Pacino, acteur découvert au théâtre, un perfectionniste qui sort rarement de son personnage. Il évoque leur méthode : ils parlent des scènes, de ce qu’ils ont vu et construisent ensemble la scène.
« Jerry à Cannes » (6′) : Jerry Schatzberg se remémore ses sélections au Festival de Cannes pour Panique à Needle Park où son actrice a remporté le Prix d’interprétation en 71 et L’Épouvantail consacré avec une Palme d’Or 1973.