Hans part aux Pays-Bas afin de se documenter pour la monographie d’un carillon. Il arrive chez le professeur Wahl qui vit dans un moulin reconverti en musée macabre, le « moulin des femmes de pierre », avec le docteur Bohlem, et sa fille Elfie. Cette dernière tombe amoureuse de Hans, qui s’inquiète de plus en plus de ces étranges statues de cire, d’une réalité troublante, qui ornent le moulin.
L’avis de Fabien
Artus Films enrichit sa collection Les chefs d’oeuvre du gothique avec Le Moulin des supplices (Il Mulino delle donne di pietra) de Giorgio Ferroni.
Les Vampires de Riccardo Freda marque le début du genre gothique transalpin en 1956. Puis en 1960 sortent 4 films importants de l’âge d’or du gothique italien: L’amante del vampiro de Renato Polselli, Des filles pour un vampire de Piero Regnoli, Le monstre du masque de Anton Giulio Majano, Le masque du démon de Mario Bava et Le Moulin des supplices. En Angleterre la Hammer enchaîne les succès avec des remakes en couleur des grands mythes littéraires exploités dans les années 30 par Universal : Dracula, Frankenstein, la Momie ou le Loup-garou.
Avant de réaliser Le Moulin des supplices Ferroni a tourné des comédies comme Macario au Far West (42) puis Macario contro Zagomar (41), un drame social néo réaliste Tombolo, paradis noir (46) et des documentaires. Après le succès du Moulin, il réalisera de nombreux péplums comme Les bacchantes (61), Hélène de Troie (61), Le colosse de Rome (65) puis, sous pseudo Calvin Jackson Padget, des westerns comme Trois cavaliers pour Fort Yuma (66), un film d’aventure La grande chevauchée de Robin des bois en 1971 puis en 1972, en reprenant son patronyme, La nuit des diables.
Coproduction franco italienne, Le Moulin des supplices a été filmé en 1.66 en Eastmancolor, procédé proche du Technicolor. Le tournage a eu lieu à Cinecitta et les extérieurs en Hollande. Le casting international comprend Scilla Gabel, Pierre Brice, Wolfgang Preiss, Dany Carrel, Liana Orfei, tous justes dans leur partition.
On y retrouve un thème classique du genre fantastique à savoir le savant fou coupable d’hubris, ici un père, commettant des crimes, des sévices pour redonner vie à un de ses proches, sa fille campée par la plantureuse Scilla Gabel. En outre le thème des transfusions sanguines régénératrices (Les vampires de Riccardo Freda en 1956), manifestation de la démence du professeur Wahl, les aller-retour entre réalité et rêve comme les nombreuses illustrations de la mort (teint cadavérique de la jeune fille, cercueils, squelettes…) participent à la création d’une ambiance morbide réussie. Le beau travail sur la photographie (lignes de fuites, tons chauds) inspirée de la peinture flamande magnifie le décor principal, un moulin et son carillon qui renferme un musée des horreurs avec des mannequins de cire, un personnage à part, effrayant. On pense en mode mineur à Les yeux sans visages de Franju (60) et à Masques de Cire (33) et son remake L’homme au masque de Cire (House of Wax) de André De Toth (53). Si on est loin de la mise en scène flamboyante d’un Mario Bava, contemporain de Ferroni dont Le masque du démon entre autres est devenu une référence incontournable et le rythme est assez poussif, Le Moulin des supplices devrait séduire les amateurs du genre; Gaspard Noé et Kyoshi Kurosawa adorent.
Technique
Ce master 2 K délivre une image stable, avec des couleurs mordorées. Le piqué n’est pas toujours acéré et les contrastes parfois à la traîne mais cette copie se révèle d’honnête facture et fait oublier la médiocre édition DVD Neo Publishing.
Au niveau audio, 3 versions en LPCM mono sont proposées : la version de référence est la version italienne, version intégrale non censurée, plus longue de quasiment 10min. La version française est passable quant la version anglaise est carrément à éviter.
Bonus
Ce beau MediaBook signé Artus Films comprend un blu-ray, un DVD et un livret de 64 pages rédigé par l’historien Alain Petit, intitulé Le moulin des femmes de pierre.
Pour la partie suppléments, sont proposés une présentation du film contextualisée et de la carrière de Giorgio Ferroni, Le docteur et les femmes (43′), par Alain Petit, un entretien avec l’actrice Liana Orfei et Fabio Melelli (25′), des séquences alternatives italiennes et américaines, un diaporama d’affiches et de photos et enfin la bande-annonce anglaise.