Allemagne 1958 : un jeune procureur découvre des pièces essentielles permettant l’ouverture d’un procès contre d’anciens SS ayant servi à Auschwitz. Mais il doit faire face à de nombreuses hostilités dans cette Allemagne d’après guerre. Déterminé, il fera tout pour que les allemands ne fuient pas leur passé.
Vu pendant les 19ème rencontres du cinéma de Gérardmer
Avis de Stéphane :
Ce film raconte l’histoire du procureur qui a permis à l’Allemagne de combattre ses démons et de connaître la vérité à propos d’Auschwitz en faisant un procès à d’anciens SS.
Avec ce long métrage, le spectateur comprend pourquoi il y a eu en Allemagne un tel déni sur ce qui est arrivé à Auschwitz et sur les horribles exactions (massacres de masses) qu’ont commis certains individus.
Car après la guerre, ces allemands se sont retrouvés libres et même protégés par des personnes influentes. Ils ont ainsi pu reprendre une vie normale sans se sentir inquiétés pour ce qu’ils avaient pu faire.
Le labyrinthe du silence montre bien les difficultés qu’a connu ce jeune procureur idéaliste pour pouvoir enquêter. En effet, beaucoup de personnes connaissaient la vérité mais préféraient se taire ou avaient eux aussi quelque chose à se reprocher.
Ce procès est indissociable de la volonté de rendre justice des crimes du nazisme.
Magnifique sur les faits historiques et ce tournant marquant dans l’histoire allemande, ce long métrage de 2 heures est passionnant.
Avis de Manu :
Premier film pour Giulio Ricciarelli, après 4 courts-métrages et une carrière d’acteur, principalement dans les séries allemandes, le jeune cinéaste s’infiltre dans cette mouvance germanique qui cherche à réparer les crimes que l’histoire à imposer à l’Histoire. Dans ce créneau, la folie du nazisme est probablement l’axe le plus mis en fiction ces dernières années.
Pour le fond, puisque c’est avant tout de ça dont il s’agit, le film reconstitue parfaitement les faits de l’époque (une part fictionnelle importante est présente dans le déroulement des actes, des affaires). De cet ordre émarge avant tout l’aspect pédagogique du film qui prend le pas sur la dramaturgie qu’on voit trop souvent poussée à son extrême sur un tel sujet. C’est donc un parti pris intéressant et, s’il n’est pas nouveau, s’avère salutaire. Le labyrinthe du silence vise juste et tente d’établir son devoir de mémoire sans pour autant tomber dans une émotivité exagérée. Là où Giulio Ricciarelli s’avère un peu plus maladroit c’est quand ce dernier tente de s’aventurer sur les pans de la romance. Elle a bien sûr sa place dans le récit mais dans la manière de dresser son récit vers des pans dramatiques, le réalisateur montre des faiblesses en contrepoint des accents historiques du film, qui eux, s’avèrent émouvants et passionnants.
C’est donc une missive intéressante et presque nécessaire que Giulio Ricciarelli offre au spectateur, par ses mouvements divers (investigation, pugnacité d’une nation meurtrie ou ignorante de son passé, administration et pouvoirs politiques aveugles), comme par son intégrité morale. Le film tutoie alors de grands moments sur ces points.
Représentant de la volonté d’une partie de la nation à combattre ses vieux démons enfouis, l’acteur Alexander Fehling, quasi inconnu à l’internationale jusque-là, personnifie habilement et avec le charisme nécessaire le jeune procureur qui a changé un pan de l’Histoire.
Il est cependant difficile d’accoler au long-métrage la notion de grand film quand dans la mise en scène tout ne semble pas être au rendez-vous. D’un classicisme nécessaire, Giulio Ricciarelli semble parfois oublier de parsemer ici et là de vraies trajectoires techniques qui porteraient le film un cran au-dessus. Ancré dans une reconstitution historique, ferme, froide et réaliste, le film est rare en instants où il tente une réelle proximité psychologique des personnages. Le pendant drama du film étouffe presque tout sur ce point.
Le labyrinthe du silence sous plusieurs aspects (historiques comme pédagogiques) semble servir de plaidoirie nécessaire à une Allemagne qui veut affronter et assumer son passé. Le film émerge même au-delà de ces frontières géographiques et tutoie l’universel, l’actuel. Hélas, des défauts mineurs, ne peuvent inscrire le film dans les chefs d’œuvres du genre, par l’aspect peut-être trop figé et littéral d’un scénario qui hésite entre fidélité historique et fiction empirique. Difficile de rester sur des accents mitigés pour un premier long, on retient alors l’engagement, la réflexion individuelle et personnelle auxquelles s’associent chacun au moment du générique.