L’Indominus Rex, un dinosaure génétiquement modifié, pure création de la scientifique Claire Dearing, sème la terreur dans le fameux parc d’attraction. Les espoirs de mettre fin à cette menace reptilienne se portent alors sur le dresseur de raptors Owen Grady et sa cool attitude.
Avis de Manu :
Près de 20 ans plus tard le parc jurassique ouvre à nouveau ses portes. Et afin de ne pas trop se tromper, on produit une suite (la 4ème donc) mais on assure le minimum syndical avec les gênes du premier opus, en gros, une sorte de reboot (remake masqué), sans la magie de la découverte et du choc pour les ados de l’époque, qu’avait pu être Jurassic Park.
Pour faire court et rentrer dans le vif du sujet, quel est le niveau de cette nouvelle attraction ? Et bien tout simplement digne de ce pour quoi le spectateur a payé. En gros, un défilé d’effets spéciaux et de spectacles, un croisement génétique entre la fête foraine et le jeu vidéo. Par contre, cinématographiquement on frôle la période glaciaire.
La chose la plus amusante du film ? Sur plusieurs points, il semble être la métaphore commerciale de ce qu’il dénonce : facilité d’attraction d’un public en manque d’émotion, erreurs du passé répétées à profusion, vide de fond et performance de la forme…tout y est.
Enfin tout, sauf une once de cinéma. Il faut d’ailleurs oublier cette notion même. La page s’est tournée depuis des années et Hollywood produit ce genre de films comme on enfile des perles.
Partant de ce postulat que reste-t-il ? Une sacrée démonstration du pouvoir forain des exécutifs hollywoodiens. Colin Trevorrow aux commandes avait réalisé jusque-là un long-métrage sympathique mais sans vrai relief Safety not guaranteed et est donc le parfait faiseur/pantin qui ne rechignera pas devant les nombreuses demandes des commerciaux afin de réaliser le film parfait.
Comme du surgelé, tout est là pour plaire au public le plus large. La fan base sera rassasiée de nombreux clins d’œil (de plus fin et fun, à l’inutile et placé là pour le principe), les plus jeunes penseront assister au spectacle ultime et accoleront hélas le mot « référence » à ce qu’ils penseront être un film d’action majeur dans l’histoire du cinéma ; quant aux moins exigeants qui savent pourquoi ils sont là, ils ressortiront rassasiés et peut-être amusés de la dernière partie du film qui trône au sommet des fin les plus invraisemblables, rayon « comme par hasard ». Mais bon, les blockbusters massifs, percutants et vides osent tout, « c’est même à ça qu’on les reconnaît ».
En outre, difficile de tirer à vue sur l’ambulance. Le contrat est rempli et le film est efficace. Il existe un public pour ce genre de film et c’est respectable. Ce qui l’est moins c’est cette propension à encore et toujours nous servir la même sauce, en nous faisant croire que les plus beaux CGI et autres effets spéciaux (pas toujours réussis d’ailleurs) peuvent cacher un manque cruel, sinon comme ici, une absence totale de mise en scène.
En fait c’est probablement ces notions d’aventure, d’évasion, d’émerveillement, de crédibilité scénaristique qui manquent foncièrement à tout ce cinéma (contrairement à la récente mise en scène de George Miller, Mad Max : Fury Road pour le contre-exemple). On repousse ici toutes les règles de l’invraisemblable pour donner plus de relief visuel aux films. Ce qui dessine ces produits vers le jeu vidéo plus que vers le cinéma et finit par vraiment lasser par leur manque d’identité. Dommage car avec de tel budget, on peut certainement en faire autre chose.
Au-delà de cet ensemble, Chris Pratt « fait le job », Bryce Dallas Howard semble être dans un monde perdu, Vincent D’Onofrio joue avec facilité et talent simplement ce qu’on lui demande. Quant à Omar Sy, son rôle de faire valoir le place comme l’acteur transposable au possible, par définition.
Jurassic World n’est pas un mauvais film, c’est le film d’une autre époque, d’un autre âge, d’une ère où le billet vert a plongé la mise en scène dans sa phase d’extinction. Celle où les pantins des studios manipulent le plus simplement du monde (ici, Colin truc, le suivant, Peter machin) pour donner vie à des films touche à tout, qui hésite entre sérieux et second degré (défi : ne pas rire lors des dernières séquences, comme la moitié de la salle).
Finalement, si Jurassic World ressemble à tout ce qu’on a vu naître sur grand écran depuis une décennie, ce dernier par son sujet est probablement la petite métaphore (par inadvertance) de ce que le cinéma rayon « attraction : Blockbuster » est devenu. Une foire où tout au long de l’année les nababs des studios ouvrent leurs plus grandes attractions, toujours plus grosses, toujours plus modernes, avec toujours plus de sensations, continuellement clonées, faisant oublier que l’art du spectacle débute souvent par un minimum de relief (et loin d’une 3D inutile) ou un début de scénario tout du moins. Le film ressemble parfaitement à son parc, proche du choc furtif, divertissant mais très loin de l’éblouissement enfantin, comme de l’enchantement qu’un adulte garde avec nostalgie.