Exclusivité Sony ayant marqué la génération PS3, Journey est récemment débarqué sur PS4 dans une version remasterisée, ceci en deux versions : une version digitale disponible sur le PSN (gratuitement pour les possesseurs de la version digitale PS3) et une édition collector rassemblant sur le même disque Journey ainsi que Flower et Flow, deux autres jeux du studio thatgamecompany. C’est cette seconde version dont nous vous proposons le test.
Le lien entre cinéma et jeu vidéo, si cher à votre serviteur, est une chose étrange. Alors qu’on le réduit souvent à la qualité d’un scénario, de personnages , de dialogues ou encore de cinématiques, certaines œuvres débarquent de nulle part pour vous rappeler combien tout cela est à la fois bien plus complexe, et finalement bien plus simple que ça. Les jeux de thatgamecompany en sont assurément le meilleur exemple. Dénués de dialogues ou de véritable personnage, ils misent avant tout sur une ambiance contemplative et sensorielle que n’auraient pas renié des cinéastes comme Terrence Malick (La Ligne Rouge), Andrew Dominik (L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford) ou encore Nicolas Winding Refn (Drive). C’est d’ailleurs ce qui fait la force et la faiblesse d’œuvres comme Journey, Flower et Flow. En effet, si les premiers pas du joueur néophyte du studio seront ponctués des mêmes interrogations, doutes, voire déceptions que certains spectateurs ont pu ressentir devant les films précités, il suffit finalement de quelques minutes pour se laisser happer par ces œuvres auquel, disons-le clairement, tout joueur se doit de s’être essayé au moins une fois !
Commençons par le jeu « principal » de cette édition collector, Journey. Dans un univers désertique, vous incarnez un personnage énigmatique au look oriental cherchant à rejoindre une mystérieuse lumière au sommet d’une montagne lointaine… Et c’est à peu près tout ce que le scénario vous réservera tout au long des trois heures de votre voyage (« Journey » en anglais). Car oui, Journey est finalement l’une des meilleures illustrations de l’adage voulant que l’important soit le voyage, et non la destination. Tout au long des différents décors que vous traverserez, vous ne saurez rien, sinon des bribes, du pourquoi et du comment de votre quête. Mais l’ambiance sublime du titre couplée à un level design très bien pensé vous donneront continuellement envie d’aller plus loin. Sans compter que la mise en scène saura vous réserver des instants mémorables à l’image de ces glissades en plein désert ou de l’escalade éprouvante de cette montagne enneigée. Mais ces moments magiques se méritent et pour cela, vous devrez progresser en récupérant ou libérant divers éléments vous permettant de débloquer le chemin ou d’augmenter votre capacité à planer, représentée par votre écharpe dont vous pourrez augmenter la longueur au fil du jeu. En prime, Journey dispose d’un multijoueur très original où vous serez amené à croiser aléatoirement un autre joueur, véritable clone de votre avatar, mais dont vous ne saurez rien et avez qui vous ne pourrez communiquer que par l’intermédiaire d’un son unique. D’ailleurs, cette capacité à produire un son ainsi que votre capacité à planer seront les seules capacités de votre avatar (outre le déplacement, évidemment). Toutefois, ne vous y trompez pas, ce gameplay épuré joue tout autant que la mise en scène ou la musique dans la dimension si particulière de Journey, renforçant la magie de cette aventure vidéoludique pas comme les autres.
Moins connu que Journey, Flower mérite lui aussi totalement le détour, ne serait-ce que par son concept. En effet, vous y dirigez… des pétales de fleurs ! Plus précisément le vent permettant de diriger ces pétales de fleurs et de fleurir, sur le principe du pollen, les différents décors que vous traverserez. Certes, présenté comme ça, on vous imagine déjà passer votre chemin, mais ne vous y trompez pas : Flower est assurément l’un des jeux les plus poétiques auxquels il vous sera donné de jouer. Magnifique visuellement, le jeu peut également compter sur une musique particulièrement douce qui transformera votre aventure (comptez deux/trois heures, comme pour chacun des autres titres) en un véritable trip zen qui vous donnera une furieuse d’aller vous allonger sur une étendue d’herbe avec le soleil pour témoin. Sans compter un level design très inspiré qui teinte l’aventure d’un discours écologique joliment amené et prenant tout son sens dans les derniers niveaux.
Enfin, concluons par Flow, où vous dirigez un micro-organisme aquatique devant manger divers éléments afin d’effectuer sa croissance et donc de survivre dans un environnement parfois hostile. De ce postulat simpliste abritant d’ailleurs les bases de ce que seront Flower et Journey (le rapport à la nature, la croissance de votre avatar…), le studio tire pourtant un jeu encore une fois très zen (une constante faisant partie du style du studio, vous l’aurez compris) teinté d’un design graphique particulièrement inspiré où les différents organismes que vous croiserez sont en fait constitués de différents dessins et figures géométriques qui, mis bout à bout, donnent vie à de véritables fresques mouvantes. Toutefois, ne vous y trompez pas, l’univers de Flow n’est pas une promenade de santé et si le jeu ne comporte pas de Game Over (ni même de HUD ou de menu, tout étant représenté ingame par les micro-organismes), vous serez parfois amené à revenir sur vos pas pour vous remettre en forme. Et ainsi finir les différentes campagnes du jeu, chacune vous mettant dans la peau d’un micro-organisme différent.
Maintenant que les présentations sont faites, abordons l’aspect technique. A commencer par le gameplay. En effet, si Journey se contrôle d’une façon assez conventionnelle faisant la part belle aux sticks et boutons (avec un peu de gyroscope), Flower joue la carte inverse puisqu’il fait la belle au gyroscope (avec un peu de stick et un bouton). Quant à Flow, il se dirige exclusivement au gyroscope. Si Flow demandera peut-être un certain temps d’adaptation, surtout ne vous y trompez pas : le gameplay des trois jeux est non seulement très intuitif, mais a aussi une réelle importance sur le véritable trip que représente chacun de ces jeux. Autant que la musique, envoutante et contribuant là aussi grandement à l’atmosphère de chacun des titres, notamment Flower où en plus de la musique, chaque fleur que vous ferez fleurir produira un son distinct créant une véritable mélodie. Quant à l’aspect graphique, si chacun de ces jeux était déjà sublime dans sa version PS3, leur remasterisation PS4 leur apporte une nouvelle jeunesse étonnante, au point que l’on pourrait presque compter chaque grain de sable dans Journey ou le moindre brin d’herbe à l’horizon de Flower.
Vous l’aurez compris, la version PS4 de Journey, Flower et Flow fait véritablement honneur à ces pépites poétiques et sensorielles que certains qualifieront parfois, à juste titre, de chef-d’œuvres. Évidemment, si vous possédez déjà l’édition collector PS3, l’achat de sa version PS4 n’est pas foncièrement indispensable (quoique…), comme avec beaucoup de Remaster PS4. Mais si il s’agit de votre première incursion dans l’univers de thatgamecompany, foncez !