Depuis quelques mois, le cinéma d’horreur français ne cesse de nous étonner et nous redonne un véritable espoir de revenir aux heures de gloires de la première décennie des années 2000 avec Haute Tension de Alexandre Aja ou encore Martyrs de Pascal Laugier. Cependant, les réalisateurs français s’affranchissent de leur terre d’origine pour tourner leur oeuvre à l’étranger, ce qui leur a pour le moins réussi. Le cas s’est confirmé à plus d’une reprise qu’il s’agisse de Ghostland de Pascal Augier, Cold Skin de Xavier Gens ou encore Revenge de Coralie Fargeat. Le cinéma de genre hexagonal ne veut plus de son décorum champêtre, rural et part explorer les déserts, les océans ou bien les maisons abandonnées de la Nouvelle-Orléans et ce n’est pas Hostile le premier long-métrage de Mathieu Turi qui va nous dire le contraire, ce dernier ayant été tourné en alternance entre désert et buildings rappelant les métropoles de l’oncle Sam.
Le long-métrage franco-belge n’a pas profité d’une sortie cinéma digne de ce nom, peinant à trouver des salles en dehors de la capitale. Cependant, Esc aura eu la merveilleuse idée de distribuer ce premier effort en passant directement par nos foyers sous les formats DVD et Blu-ray. L’article suivant reviendra au travers de deux grands axes autour l’oeuvre d’un réalisateur sur lequel il faudra désormais compter :
I) La critique de Hostile
II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-ray
L’avis de Quentin :
I) La critique de Hostile
Hostile est une oeuvre à la croisée des mondes aspirant à introduire dans son univers post-apocalyptique des dimensions horrifiques, romanesques et parfois même prophétiques. Un véritable challenge pour une oeuvre d’une durée dépassant tout juste les 80 minutes. C’est pourtant le défi que parvient à relever le jeune réalisateur.
Le long-métrage alterne temps présent, au bout milieu d’un désert post-apocalyptique à la Mad Max mais également temps passé, l’époque dans laquelle nous vivons. Nous suivrons à la manière d’un puzzle, la vie de Juliette interprétée par Brittany Ashworth, semblant être une redoutable survivante au beau milieu du désert. Cependant, elle se révèle avoir été une ancienne prostituée héroïnomane dépressive par le passé. Ce miroir divergent auquel le spectateur assiste ne fait qu’éveiller la curiosité. On ne peut que se questionner sur les raisons ayant transformé cette femme de victime sociétale en Rambo du désert. Le développement narratif y est particulièrement bien pensé et articulé, attirant notre attention de la première à la dernière seconde, alternant entre sublime paysages désertiques et monde urbain aseptisé.
La thématique du film joue beaucoup autour de la problématique du destin et plus largement de la notion d’âme soeur. On ressent de manière continue, un rapport au cosmos liant les protagonistes entre les deux époques, un lien fort dépassant le temps, la vie, la mort.
Le film questionne également de manière assez épisodique mais intéressante la notion de beauté. Il revient sur ce qui est jugé et qualifié de beau, souhaitant porter la définition vers une approche beaucoup plus personnelle que ce qu’elle est aujourd’hui. Il invite le spectateur à se dévêtir des archétypes traditionnel et tente une dissociation entre la beauté sensible et la beauté normée. Pour appuyer le propos, l’acteur principal, Grégory Fitoussi, revient sur l’art et plus particulièrement les peintures de Francis Bacon. Il essaie d’éduquer l’héroïne à la beauté subjective et plus simplement à déconstruire son identité pour se reconstruire en étant plus en phase avec soi-même.
C’est d’ailleurs le processus le plus exaltant que nous propose Mathieu Turi, le parcours identificatoire de son héroïne, la manière dont il narre l’histoire de cette jeune héroïnomane à travers sa déconstruction à la fois sociale, physique et intellectuelle pour construire un personnage fort de ses expériences passés. Il s’avère être un excellent conteur, épaulé par son monteur Joël Jacovella.
Au-delà de ce parcours initiatique, le cinéaste se révèle être un adroit metteur en scène de terreur, nous plongeant durant une importante partie du film dans un huis clos suffocant. L’héroïne se retrouvant bloqué dans son véhicule renversé de nuit, alors que des créatures sont de sorties. Tout un programme d’horreur radical, nous rappelant parfois Je Suis Une Légende de Francis Lawrence de par son côté crépusculaire. Les créatures que nous proposent Hostile, sont très réussies autant de par leur gestuelle que leur condition physique, on en frissonne à plusieurs reprises.
Cependant, le film se retrouve à plusieurs fois limité par le jeu de ses acteurs, tout particulièrement lors des scènes romantiques urbaines. Tout va beaucoup trop vite et Grégory Fitoussi peine à nous convaincre, en Bradley Cooper bon marché. On y voit plus une caricature de l’homme sauveur, rédempteur, qu’une belle histoire d’amour et c’est bien dommage aux vues de toutes les belles réussites que nous propose le film.
Hostile en quelques mots est un film d’horreur initiatique envoûtant mêlant romanesque et terreur pure avec un sensibilité certaine. Le film de genre français n’a pas fini de nous étonner. Il ne nous reste plus qu’à attendre de découvrir les prochaines réalisations de Mathieu Turi pour, de manière certaine, confirmer son statut de personnage important dans le cinéma d’horreur hexagonal ou bien même international.
II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-ray
Image :
Le master proposé par ESC est tout simplement fabuleux. Une image resplendissante tout du long nous fait totalement plonger dans l’enfer du film. Le niveau de piqué est extrêmement bien travaillé offrant un niveau de détails et de réel stupéfiant. De plus, la profondeur de champ se ressent dans les grandes étendues désertiques et l’on se retrouve bien souvent émerveillé par ce jeu sur les couleurs durant les diverses scènes nocturnes allant du rouge à l’orange. L’éditeur français nous gâte avec une telle proposition !
Note image : 4,5/5
Son :
Deux pistes son sont proposées sur l’édition Blu-ray :
- Version Originale Dts-HD 5.1 : La version anglaise est à l’image du master image tout semble irréprochable. On ressent les moindres actions des personnages et l’on se trouve scotché à notre fauteuil à chaque coup de feu. Tout a été préparé et pensé avec finesse pour un univers sonore simple mais percutant qui ne lâchera pas le spectateur jusqu’à la dernière seconde. Seul petit reproche, Grégory Tifoussi n’est pas à son aise avec l’anglais et cela se ressent à travers son accent à plusieurs reprises. Bravo encore à Esc pour cette judicieuse collaboration entre image et son qu’ils nous proposent
- Version Française Dts-HD 5.1 : La version française est tout à fait honnête et pourra très bien être regardée de manière comparable à la version originale. Les voix ne prenant pas trop l’ascendant sur l’univers sonore.
Note son : 4/5
Suppléments :
L’éditeur parisien ne se montre pas économe en bonus et nous promet de nombreux suppléments qui s’avèrent assez inégaux, offrant néanmoins de belles surprises :
- Le Making-of du film : Un document tout simplement réjouissant tant ce type de support disparaît de plus en plus sur les éditions Blu-ray. On se plait à connaître les conditions du tournage mais également tout le travail qui a été constitué en amont pour pouvoir bénéficier de la réussite qu’est Hostile. Le meilleur supplément de l’édition qui nous ait proposé.
Par la suite, un enchaînement de courtes séquences revenant sur certains point du tournage est proposé allant du point de vue du cinéaste jusqu’à un court entretien autour de la créature ayant du mal à convaincre :
- Habiller et maquiller : l’apocalypse (4′)
- Storytelling d’une apocalypse (3′)
- Javier Botet : l’homme derrière la créature (3′)
Un commentaire audio du réalisateur est également disponible permettant de se réjouir de l’enthousiasme de son réalisateur et confirmer la place importante que ce dernier risque d’occuper dans les années à venir.
Enfin, le Blu-ray nous propose une scène coupée qui saura satisfaire les futurs fans du film.
Note suppléments : 3,5/5