Ariane est persuadée que son compagnon Jean-Jacques fantasme sur une autre femme. Pour sauver son couple, elle lui demande d’avoir une aventure avec celle-ci, pensant qu’il s’agit du meilleur remède pour le libérer. Lorsque Jean-Jacques se rend chez cette femme qu’il connaît à peine, il ne sait pas encore où il va mettre les pieds…
En salle dès le 24 juin 2009
Avis LeStein :
Fais-moi plaisir! Ce Film au titre terriblement aguicheur et candide au plus haut point pourrait être une œuvre D’Almodovar. Mais heureusement pour nous, ce film est purement français. Je ne connaissais rien de l’univers d’Emmanuel Mouret et de son dernier film je n’en ai lu que ces quelques lignes : Ariane est persuadée que son compagnon, Jean-Jacques, fantasme sur une autre femme. Pour sauver son couple, elle lui demande d’avoir une aventure avec celle-ci, pensant qu’il s’agit du meilleur remède pour le libérer. Et cette photo qui résume tellement le décalage et l’esprit du film.
Comment a t-il fait pour en arriver là!
Il aura fallu que ces quelques mots et cette image pour que me donner l’envie d’aller voir ce film. Est-ce parce que j’avais vu, la veille, une pièce de théâtre dont le film me faisait légèrement écho ou la possibilité de voir en chair et en os le réalisateur ? Les deux raisons en sont la cause. Tout ceci pour vous dire laissez-vous tenter par Fais-moi plaisir!
Emmanuel Mouret, jeune réalisateur sorti d’une grande école, parle de cinéma, de l’homme, du désir, de l’art, de politique, d’amour, de comédie, d’inconscient, de la vie de couple et de la vie en général. A la manière d’un Woody Allen, il campe un homme, candide à souhait, raconte une histoire insignifiante à sa compagne mais cette dernière y voit la fin d’un amour inébranlable. Dès lors, elle le pousse dans les bras de cette femme afin que ce fantasme soit nourrit, exécuté et enterré.
Avec l’éloquence d’un Buster Keaton et la légèreté d’un Jacques Tati, Jean-Jacques, interprété par Emmanuel Mouret, va traverser les multiples tableaux qui s’offrent à lui et ainsi, nous faire partager un regard maladroit et naïf sur les gens, les classes sociales, les rêves, les envies, les doutes qui composent une société non évoquée mais tellement réaliste.
La simplicité n’est ici qu’une illusion. Ariane pense que c’est une décision aisée qu’elle vient de prendre en envoyant son compagnon dans les bras de cette femme. Cet acte ouvre une porte que l’on peut parfois regretter d’avoir ouvert. Est-ce pour mettre à l’épreuve l’amour de son compagnon ou pour tester le sien ? Car Fais-moi plaisir! est avant une histoire d’amour, de couple, qui pose les grandes questions : sommes nous capable dans notre vie de couple de tout se pardonner ? Est-il possible que mon compagnon s’ennuie de moi ? Tout simplement : est-ce le bon ?
Vous l’aurez compris, Fais-moi plaisir! est un film français avec toute la complexité que le cinéma français aime mettre dans ses films.
Fais-moi plaisir! fait intègre le cercle des œuvres cinématographiques qui parle du cinéma. La mise en abîme est parfaite, nous parlons d’un cinéma qui parle de cinéma dont le sujet est l’homme dans toute sa splendeur. La scène d’introduction rappelle agréablement Godard et Le Mépris avec Michel Piccoli et cela nous fait rebondir sur tout le cinéma de Piccoli avec Ce n’est pas tout à fait la vie dont j’avais rêvé et surtout Les cent et une nuits de Simon Cinéma d’Agnès Varda. Nous n’aurions pas été étonné de voir une multitude de caméo du grand monde du cinoch à la manière d’un Bertrand Blier avec Les Acteurs. En fait, Emmanuel Mouret a réuni Piccoli, Varda, Blier, et les grands acteurs en prenant Judith Godrèche et Jacques Weber qui traînent tous deux un bagage cinématographique impressionnant.
Il n’en oublie pas moins le cinéma actuel puisqu’il s’entoure de jeunes acteurs et actrices dont Déborah François, mignonne de simplicité découverte par les frères Dardenne ou Frédérique Bel. Il englobe ainsi tout le monde du cinéma dans quelques acteurs et personnages.
Il y aurait pu avoir un défilé d’acteurs mais Fais-moi plaisir! ne parle pas que de cinéma. On y traite l’art en général et à la manière d’une pièce de théâtre, nous suivons l’aventure extraordinaire mais tellement banalisée, de la vie de Jean-Jacques. Personnage qui se retrouve dans des situations qu’il a ou n’a pas provoqué, qui se laisse bercer par la volonté des autres et ainsi fait des rencontres. Il rencontrera trois femmes de milieux différents, parfois timides, parfois impétueuses, parfois excentriques, mais qui ne veulent qu’une chose partager leur vie.
Evoluant dans la comédie, Fais-moi plaisir! se compose de tableaux, d’actes. Tel Méliès, Emmanuel Mouret, installe un univers propre à chaque personnage féminin qu’il va traverser avec plus ou moins de facilité, d’humour, de quiproquos. Et tel Peter Sellers dans The Party et surtout Pierre Richard, il va lui même se poser des questions sur sa vie et découvrir un monde qu’il ne connaît pas . Car si d’un premier abord, le personnage, quasi muet ou un peu fou qu’il semble être (il est l’inventeur de stylo qui ne marque pas quand on l’efface), est doté d’une aura qui pousse les autres personnages à se laisser aller à tout. Cette inconnue voit en lui une grande liaison, la servante espère et sa compagne s’égare.
Si le réalisateur dit avoir pioché dans le cinéma comique américain, c’est surtout un côté français qui est en filigrane. Du Bourgeois gentilhomme à l’Avare, des chansonniers aux vaudevilles actuels comme le Clan des divorcées, le monde théâtral se fait une place dans Fais-moi plaisir!. Pierre Richard et sa maladresse légendaire, ainsi que Jacques Audiard aux dialogues exceptionnels ne sont pas oubliés. Nous avons même un Danny Brillant magnifique évoluant tel un Lino Ventura dans Les Tontons Flingueurs ou Les Barbouzes.
Cette naïveté et ses sujets de fonds sont traités par un comique de situation exceptionnel laissant un léger déjà vu mais si salvateur. Emmanuel Mouret le reprend avec beaucoup d’hommage et le fait sien pour notre plus grand plaisir!