Jon Banks est un psychiatre ambitieux. Quand une jeune femme, Emilie, le consulte pour dépression, il lui prescrit un nouveau médicament. Lorsque la police trouve Emilie couverte de sang, un couteau à la main, le cadavre de son mari à ses pieds, sans aucun souvenir de ce qui s’est passé, la réputation du docteur Banks est compromise…
L’avis de Manuel Yvernault :
Steven Soderbergh est un réalisateur à part dans le paysage hollywoodien. Né cinématographiquement dans les jupes indé de Sundance, il n’a cessé d’étonner de film en film. Il y a bien sûr les « contre », voire les « anti », qui pensent que la qualité de ses films est liée à ses scénarios (N.B : revoir L’anglais…), et les « autres », ceux qui pensent que ce metteur en scène a au moins ce petit quelque chose de particulier.
Il peut réaliser un documentaire sur Spalding Gray (And everything is going fine, à voir !) et l’année suivante cumuler une participation en tant que réalisateur deuxième équipe à Hunger Games, réaliser Contagion, Piègée et Magic Mike dans la foulée. On passe sur les années Ocean’s Eleven, suivi de Full Frontal puis du remake de Solaris, etc. Le cinéma de Soderbergh est pluriel et ce sans vraiment se fourvoyer au service des studios (à quelques exceptions près).
Effets secondaires ne déroge pas à la règle. Cette dernière réalisation, hommage aux films noirs hollywoodiens, s’avère maîtrisée et captivante. Le réalisateur a ce savoir faire, d’un cinéma à l’esthétique prononcée (nombreux filtres, certains tics de réalisation rejetés par beaucoup) avec la liberté d’un récit toujours différent. L’ensemble donne cette sensation qu’il se réapproprie chaque genre tout en gardant les règles narratives classiques.
Cette fois franchement bien aidé par Scott Z. Burns, une fois de plus scénariste après The Informant ! et Contagion, Soderbergh réussit son effet de surprise. Opérant un virage à 180 degrés le film a la bonne idée de changer de genre sans en modifier le ton et l’ambiance, même si l’effet de manche est facile, c’est assez malin et l’opération séduction s’avère séduisante pour le spectateur.
Là où l’ensemble prend encore de l’ampleur c’est quand, en plus de modifier l’histoire, ce virage touche également le traitement des personnages. Les règles sont bousculées mais l’intention non modifiée. Car Steven Soderbergh aime railler son monde, il l’a souvent prouvé dans ses précédents films.
Ainsi on passe d’un drame sur l’industrie pharmaceutique au film néo-noir d’une passe subtile. Soderbergh aime le bluff, la couverture de façade. Pas dans un médiocre artifice joueur qui perdrait le spectateur, non, plus pour détourner certains apparats visuels, que sa mise en scène souligne et concentrer ensuite l’ensemble sur la partie humaine du long-métrage.
Bien aidé par son casting, Rooney Mara encore une fois à sa place, un Jude Law des bons jours, Effets secondaires s’avère une bien belle surprise. Et si on retrouve toujours cette touche d’ironie dans le cinéma de Soderbergh, c’est sans doute pour donner encore et toujours du grain à moudre aux détracteurs du cinéaste. Détracteurs qui devront bien finir par admettre que même si pour ces derniers ce n’est pas du « Grand » cinéma, la partie divertissante de ses films est toujours réussie. Et là, peu de metteur en scène actuels peuvent répéter cet effet à chaque film. Vivement le prochain.