Le 28 juin 2005, un commando de quatre Navy Seals prend part à l’opération « Red Wing », qui a pour but de localiser et éliminer le leader taliban Ahmad Shah. Mais rapidement repérés et encerclés, les quatre soldats vont se retrouver pris au piège.
L’avis de Manu Yvernault :
Peter Berg, une énigme. Découvert il y a 20 ans dans le très bon The Last Seduction, qui a un peu vieilli après l’avoir revu récemment, mais reste cependant un très agréable John Dahl, s’est très vite découvert une carrière de réalisateur.
Son premier essai (hors séries), Very Bad Things, montrait une certaine audace à une époque où ce genre de film était plutôt commun (par exemple, The Last Supper). En somme, un bon faiseur plus qu’un auteur. Il est plus difficile par la suite de trouver un gène commun à sa filmographie. Malgré un intéressant film sportif, Friday Night Lights qui donna naissance à la série du même nom, difficile de trouver de vraies perles dans les longs-métrages qu’il a réalisé (Hancock, Le royaume). De passable donc à grossier et bâclé (Battleship), bien que certains trouvent une certaine dérision assumée à ce dernier film…c’est un point de vue.
Peter Berg n’a donc jamais vraiment convaincu et encore moins réuni des avis critiques et publics sur un même projet.
Du sang et des larmes pourrait bien changer cette donne. Pour ça, il faudra pour autant passer outre la violence brute qui donne à son film son ADN particulier.
Ici, la part belle est faite au réalisme afin de rendre le plus crédible possible la lutte de ces quatre soldats poursuivis par des talibans. Dans la même idée il n’y a pas réellement de discours propre au film. Le réalisateur ne tente pas d’intellectualiser son sujet. Du sang et des larmes n’est qu’un hommage pur aux corps de l’armée américaine et de ses valeurs que certains voient comme patriotique quand elle peut aussi, comme ici, être fraternelle.
Forcément, la critique intellectuelle hexagonale ne devrait pas suivre. Cela ne serait probablement pas rendre justice à un tel film. S’il n’est pas une nouvelle pièce maîtresse du 7ème art, il est d’une efficacité et d’une implication peu commune, de son réalisateur tout comme des comédiens.
Les longues scènes d’exposition servent parfaitement le récit une fois que celui-ci prend une direction de film d’action, sans en copier les pires oripeaux. En plus de nous avoir montré les liens qui unissent ces militaires au-delà de leur simple expérience professionnelle, le corps de l’armée prend une forme toute particulière, fraternelle. Si on ne peut totalement adhérer à ce genre de démonstration, difficile de ne pas respecter ceux qui s’impliquent au travers ce corps, avec ses valeurs et ses codes.
Du sang et des larmes prend une hauteur toute particulière dans le réalisme de l’action. Les corps sont déchiquetés, abîmés, usés; chaque choc, impact est subi par le corps humain dans un réalisme rare, réalisme qui renvoie au meilleur film du genre. Les quatre soldats dépérissent devant nos yeux de façon quasi documentée, les chairs sont réellement mises à nues, les réactions (tactiques) sur le terrain d’une crédibilité rare. Mais Du sang et des larmes est également un film découpé et rythmé avec le plus grand soin. L’application portée à la mise en scène donne donc une valeur importante au métrage sans pour autant être son seul atout.
Ce réalisme est porté par un quatuor de comédiens tous aussi efficaces les uns que les autres, dirigés par un réalisateur qui sait parfaitement où il va.
Peter Berg finit donc par surprendre dans son dernier film. Si Du sang et des larmes n’est pas la perfection même, il est avant tout une excellente surprise et une belle réussite.
Sans jamais faire la part belle à l’Oncle Sam dans un film proche de la propagande, le réalisateur contourne tous les clichés du genre et prend son sujet à bras le corps. Cette implication rend Du sang et des larmes prenant, crédible et terriblement efficace sans ne jamais sacrifier totalement la réalisation à l’histoire. On n’échappe pas à une vision hollywoodienne mais cette fois cette dernière à la mérite de respecter le genre plus qu’à l’accoutumé. Rien que pour ça Du sang et des larmes mérite sa petite décoration.