L’avis de Quentin :
Après pas moins de sept films, la saga Chucky touche à sa fin en 2017 avec Le Retour De Chucky de Don Mancini. La saga horrifique avait connu quatre premiers films d’excellentes factures sachant se renouveler à chaque incursion dans la mythologie créé par le cinéaste Tom Holland. Néanmoins la reprise de la franchise en 2004 et la vision de Don Mancini sur la poupée tueuse ont petit à petit enterré la saga, enfermant les films à de simples sorties DVD. C’est alors qu’en 2018, apparaît l’intention de relancer la série en la reprenant à zéro, donnant à notre « héros » une nouvelle chance, le propulsant dans une nouvelle ère.
Néanmoins que vaut ce nouveau Chucky, est-ce une réelle renaissance de la licence culte ou bien une ultime mise à mort pour le jouet le plus célèbre des années 80 ?
Le Chucky nouvelle génération reprend ainsi sur de toutes nouvelles bases faisant table rase du passé. Nous avons alors le droit à un nouveau look mais également à de nouvelles contraintes face aux changements fondamentaux que connaît le marché des jouets et les nouvelles technologies. On y découvre un jouet qui n’est pas seulement important pour les enfants, mais une création se trouvant au centre de la maison et du tout connecté. Le film d’horreur dépasse la simple approche récréative et nous emporte vers un pamphlet sur les tenants mondiaux du tout-connecté : Apple, Google ou bien Samsung.
Le nouveau modèle de poupée peut alors prendre contrôle de tous les appareils de la maison, ces derniers n’appartenant qu’à une seule et même filiale : Kaslan. De ce fait, Chucky peut désormais contrôler la télévision, la radio, la lumière mais également les caméras, téléphones, voitures sans chauffeurs et même le chauffage. On assiste à travers cette vision moderne à une véritable attaque, intrusion dans la vie privée. Child’s Play aurait d’ailleurs très bien pu être un excellent épisode de Black Mirror tant il traite des déviances opérées par l’utilisation de nouvelles technologies.
De plus, le film abandonne l’approche vaudou de la saga originale et donne des explications beaucoup plus réalistes des motifs poussant la poupée à agir de telles manières. Le cinéaste, Lars Klevberg, parvient à la fois à actualiser son propos, à le mettre dans l’air du temps mais également à traiter de problématiques mondiales. On y voit un monde en proie à la division avec d’un côté les constructeurs et de l’autre les acheteurs. Le film s’ouvre sur un ouvrier asiatique ne supportant plus ses conditions de travail pour satisfaire l’Amérique de l’oncle Sam. Il décide d’incorporer dans une poupée les gênes du mal en modifiant la puce de ce dernier. Pour cela il retire tous les interdits de la poupée et en fait une créature disposant de son libre arbitre.
C’est d’ailleurs une approche saisissante que d’avoir une poupée n’étant ni bonne ni mauvaise mais qui en fonction de l’éducation qui lui sera donnée deviendra le monstre que l’on connaît. Cependant on comprend très vite les prédispositions de Chucky à faire le mal. Comme on dit il faut dix bonnes actions pour entériner une mauvaise action. C’est justement le problème lorsque la poupée est remise entre les mains d’un jeune garçon en pleine crise d’adolescence.
Néanmoins Child’s Play ne renonce pas totalement à son patrimoine et revient à travers de nombreux détails au film matriciel Jeu D’Enfant. Par exemple, l’appartement dans lequel se déroule l’histoire est à peu de choses près le même où se déroulait il y a plus de trente ans le premier volet de la saga. Le réalisateur américain s’est aussi permis de rendre hommage à de nombreux films allant de Massacre à la Tronçonneuse 2 de Tobe Hooper jusqu’à E.T de Steven Spielberg en passant par la saga Saw créée par James Wan. On peut alors se réjouir de voir des films comme celui de Hooper, placé au rang de film référentiel lorsque l’on connaît le difficile parcours de ce film autant dans son accueil critique que public.
Mais il ne s’arrête pas en si bon chemin pour les hommages et va directement attaquer Toy Story qui sort son film à une semaine d’intervalle et c’est peut être la référence la plus drôle du film qu’il s’agisse de la chanson de Chucky ou bien le nom d’Andy pour le propriétaire du jouet diabolique, tout a été pensé pour nous faire sourire.
Child’s Play : La Poupée Du Mal est certainement l’un des meilleurs opus de la saga, il parvient à convier avec brio humour, terreur et gore à un niveau que nous n’avions plus vu depuis plusieurs années. Chucky vit un véritable bain de jouvence en espérant que la suite de sa carrière au cinéma puisse tirer profit des nouvelles bases qui ont été proposées par Lars Klevberg. Une franche réussite pour ce reboot tant redouté !