En ce début d’année 2019, l’éditeur italien Spasmo Video, connu pour ses films d’horreur underground, négocie un virage important dans le monde impitoyable de la distribution vidéo physique, avec le passage au format Blu-ray. Pour se garantir un passage réussi du DVD au Blu-ray, l’éditeur italien va monter une première salve de sortie solide avec :
- Gutterballs de Ryan Nicholson
- 100 Tears de Marcus Koch
- Inbred de Alex Chandon
- Cat Sick Blues de Dave Jackson
Nous nous pencherons aujourd’hui sur le cas du controversé Cat Sick Blues, film australien réalisé en 2015. Le film de Dave Jackson s’est construit un véritable petit mythe au rythme des festival de genre ces dernières années.
Tout d’abord, lors du LUFF, où plusieurs personnes ont quitté la projection incriminant le film d’inciter à la violence, notamment envers les femmes. Il s’en est suivi une projection également remarquée, de manière positive, cette fois-ci, à l’événement parisien Sadique Master Festival. Le mythe n’a cessé de se construire autour de ce Cat Sick Blues à l’échelle du cinéma underground, jusqu’à l’interdiction de sortie en vidéo du film en Nouvelle-Zélande pour incitation à la violence, notamment envers les femmes, et pour certaines scènes jugées insoutenables.
Le phénomène Cat Sick Blues est lancé, son statut de film underground passe immédiatement au rang de film culte.
Néanmoins, aucune distribution n’est proposée en Europe, rendant le film assez difficile d’accès, jusqu’à ce que Spasmo Video mette la main sur l’œuvre pour nous la proposer avec pas moins de six sous-titrages différents (Italien, Anglais, Français, Espagnol, Allemand et Japonais) ainsi qu’un zonage libre, permettant désormais à ce film de passer sur les écrans du monde entier.
Notre chronique de Cat Sick Blues se fera en deux temps :
I) La critique du film Cat Sick Blues
II) Les caractéristiques du combo Blu-ray/DVD
I) La critique du film Cat Sick Blues
Cat Sick Blues nous fait suivre la vie de Ted, un trentenaire, qui a perdu son chat : Patrick. Son unique but, désormais, est de faire revenir Patrick à la vie, et cela par tous les moyens. Il va alors devoir récolter le sang de neuf personnes, neuf vies volées pour redonner vie à son félin bien-aimé.
Avec ces quelques lignes, tout le propos de Cat Sick Blues est révélé. Une histoire simple, qui permettra à Dave Jackson de mettre en scène les moindres de ses envies.
On assiste alors à un film mêlant humour et scènes de massacre avec un rythme effréné, il ne passe pas plus de 5 minutes sans que nous ayons des scènes de terreur.
L’humour y est corrosif s’attaquant aux déviances des réseaux sociaux, d’un monde où tous les regards sont rivés sur les écrans, où tout est sujet à jugement. Jackson nous place alors dans un univers où les détraqués règnent en maître, agissant dans l’ombre des écrans, se faisant discret, pour mieux sévir. Il met l’accent sur les youtubers, la mode des hashtags et la e-réputation afin de faire pénétrer la comédie satirique dans sa création.
Le réalisateur n’use pas seulement du comique de situation, il met également en avant la comédie de l’absurde avec un personnage principal imitant jour après jour un peu plus le comportement de son chat allant jusqu’à la plus grande des intimités. Son costume de chat porte également tous les gimmicks de l’absurde, avec son t-shirt trop court, son masque de chat servant également d’abat-jour ou bien même ses « accessoires » de chat tels que ses gants agrémentés de griffes. Nous n’en dirons pas plus sur l’attirail absurde et bestial du tueur, la surprise ne sera que plus que grotesque.
Néanmoins, cette comédie de l’absurde, se veut parfois trop insistante et tire ainsi donc vers le grotesque qui peut alors soit nous sortir totalement de l’oeuvre et faire décrocher le spectateur soit le ramener à la cruauté pure dont fait preuve le personnage principal au fur et à mesure de ses meurtres.
C’est d’ailleurs sur cette note que se joue tout le film, cette manière de jouer sur la notion de tolérable et d’intolérable. Le film s’approche régulièrement du concept d’intolérable, sans pourtant jamais mettre les pieds dedans et c’est en quelques sortes la « finesse » dont arrive à faire preuve le film, cette manière de nous maintenir au seuil de l’inacceptable.
Cat Sick Blues surprend, nous propose des approches du cinéma gore que nous n’avions pas vu depuis longtemps et parfois même que nous n’avions jamais vu. Le film est une proposition nouvelle dans un genre qui se fait de plus en plus répétitif. Le schéma narratif de Cat Sick Blues rappelle très souvent le film-matrice du cinéma gore Blood Feast de Herschell Gordon Lewis. On pense aussi au genre du Horror Body, initié par David Cronenberg, durant la parenthèse finale du film.
On se retrouve donc face à un cinéaste amateur du cinéma de genre qui aura su jouer avec intelligence sur les différents registre du Slasher, du Gore, du Comique mais également du Body Horror.
Dave Jackson, en plus de nous surprendre à travers son univers à mi-chemin entre le glauque et l’humour, nous offre une bande son radicale, ouvrant le film sur un morceau de Grindcore des plus efficaces et tout au long du film il ne cessera de nous surprendre sur ses choix musicaux alternatifs.
En ce qui concerne la violence gratuite contenue dans le film, réservé à un public plus qu’averti, elle est d’une singularité que l’on n’avait plus l’habitude d’avoir depuis quelques années dans le genre. Néanmoins, cette volonté d’anéantir les femmes tout au long du film, s’avère particulièrement gênante, malsaine. C’est ce que recherche le film, il veut choquer, il veut provoquer et il y arrive avec brio à tel point que l’une des interprètes féminines va aller jusqu’à demander à Ted pourquoi il ne s’en prend qu’aux femmes. Cet aspect fait perdre au film de sa valeur, cette manière d’essayer de nous communiquer cette sensation de malaise en s’en prenant continuellement au sexe féminin en devient même pathétique.
Cat Sick Blues est un film original, avec sa propre mythologie, rendant hommage à tout un pan du cinéma d’horreur réussissant à crier haut et fort son appartenance à une culture alternative, parvenant à célébrer l’underground à tous les niveaux. En cela cette petite production australienne amorale, malgré ses imperfections, a le mérite de nous emmener sur de nouveaux territoires, horizons et vient nous rappeler que l’Australie est une terre où le cinéma de genre a tous ses droits.
II) Les caractéristiques du combo Blu-Ray/DVD
Image :
La version proposée par Spasmo Video est en 1.78:1 avec un master en 1080p.
Le grain apparait lors des séances se déroulant dans l’obscurité mais, ces scènes n’étant pas légion, cela n’altère pas la qualité du visionnage sur la totalité du Blu-ray.
La copie du film est de très bonne facture pour cette première sortie blu-ray chez l’éditeur italien.
Note Image 4/5
Son :
En ce qui concerne le son, nous pouvons regretter l’absence d’une piste HD et nous contenterons donc d’une unique piste 5.1 anglaise.
Cependant le travail sur le son pour cette piste 5.1 a été réalisé avec soin et dispose d’un excellent rendu durant le visionnage du film.
Enfin, nous pouvons nous attarder sur le fait que Spasmo Video a pensé à la distribution de son film à un niveau international proposant pas moins de six sous-titrages différents dont l’italien, le français, l’anglais, l’espagnol, l’allemand et le japonais.
Note son 3,5/5
Les suppléments :
Les suppléments de Cat Sick Blues sont répartis sur les deux disques. Attention, cependant, les suppléments n’ont pas le sous-titrage français, seulement anglais.
Tout d’abord le DVD regroupe 4 courts-métrages de Dave Jackson, permettant de mieux saisir le propos du réalisateur ainsi que son univers. Il est également très agréable de pouvoir découvrir le court-métrage de Cat Sick Blues datant de 2013.
Les courts métrages présents sur le DVD sont les suivants :
- Cat Sick Blues
- Gacha Gacha
- Dietro le Quinte
- Fully Grown Babies
- Kappa
Le disque Blu-Ray, contient de nombreux bonus, tous plus intéressant les uns que les autres, le travail de Spasmo Video est assez impressionnant autour de son protégé. On retrouve donc sur ce disque :
- Introduction au film par Alex Visani
- Le trailer de Cat Sick Blues
- Un entretien avec Shian Denovan, l’actrice principale du film.
- Le symbole du chat dans le cinéma d’horreur : Un documentaire revenant durant une quinzaine de minutes sur la figure et les représentations du félin domestique dans le cinéma d’horreur.
- Aussie Gore : Le sang sur la terre des kangourous : Un documentaire revenant sur le cinéma d’horreur en Australie et son traitement à part dans le paysage horrifique international.
- Le commentaire audio de l’équipe du film
- Le commentaire audio des producteurs du film
Les suppléments 4,5/5
Spasmo Video nous régale d’une édition complète et regorgeant de suppléments tous plus intéressant les uns que les autres pour un film encore confidentiel. Avec une telle édition, l’avenir de l’éditeur italien a encore de beaux jours devant lui. Un grand pas pour Spasmo Video mais également pour Cat Sick Blues qui s’approchait chaque jour un peu plus du panthéon du cinéma extrême et qui grâce à cette sortie peut désormais fêter son intronisation.