Suite à la sortie le 6 janvier du DVD français du film « X-Cross » chez l’éditeur Seven Sept (et de « Tokyo Girl Cop » -aka « Yo-yo Girl Cop »– chez WE Prod le 18 février !), nous vous proposons un entretien-carrière avec le réalisateur japonais…
Fils de l’immense Kinji (des dizaines de yakusa-movies dans les 70’s dont « Combat sans code d’honneur » et « Le Cimetière de la morale », puis le film choc « Battle Royale » en 2000…), Kenta FUKASAKU est venu au Festival International du Film Fantastique de Bruxelles (BIFFF) en 2008 pour y présenter son troisième long-métrage en solo, « X-CROSS ».
Ce fut l’occasion pour nous de rencontrer ce sympathique cinéaste japonais de 35 ans afin de nous entretenir avec lui de sa jeune carrière…
Tout d’abord, pouvez-vous nous parler de vos débuts ? Vous avez commencé en tant qu’assistant-réalisateur en 1996…
Eh bien, depuis l’âge de 5 ans, j’accompagnais mon père sur ses tournages, et depuis lors, je me suis fait petit à petit une idée de ce qu’était un metteur en scène de cinéma…
Mais une fois en âge de travailler, je trouvais ses méthodes vraiment trop lentes !!! C’est ainsi que j’ai intégré une autre équipe, plus jeune et plus rapide…
En 1996, j’ai débuté à la télévision en travaillant sur des séries comme les « Power Rangers »…
Puis j’ai été assistant-réalisateur sur plusieurs métrages, dont des films de yakusas et des films érotiques.
En 2000, vous êtes crédité en tant que producteur et scénariste pour « Battle Royale »… Quelle a été votre contribution au film ?
Il est vrai que sur ce projet je cumulais 2 jobs…
Mon père était déjà âgé, mais il tenait à livrer une histoire contemporaine, ancrée dans la réalité du Japon actuel. C’est moi qui lui ai fait part du livre, et au niveau de l’écriture du scénario, nous nous sommes divisé la tâche en 2: je m’occupais de décrire les jeunes écoliers de l’histoire, car il est évident que je connaissais mieux le monde des ados, pendant que mon père s’occupait de l’univers des adultes, incarné notamment par le personnage joué par Takeshi Kitano…
On imagine aisément que finir la séquelle de ce film-choc, intitulée « Battle Royale 2: Requiem », a dû représenter un challenge très particulier pour vous, après le décès de votre père…
Oui bien sûr !!!
Même si pour un premier film, l’expérience au niveau technique n’a pas été trop dure, car j’étais déjà familier avec l’univers « Battle Royale » et que j’avais un background d’assistant-réal, cela a surtout été difficile car j’avais perdu mon père !
Mais en fin de compte, finir ce film a été une expérience plutôt cathartique, qui m’a permis de surmonter l’épreuve…
La scène d’exposition de ce film est pour le moins dérangeante: on y voit en effet deux immenses tours s’effondrer après un acte terroriste, et ce moins de 2 ans après le 11 septembre !!! Etait-ce une volonté de choquer purement intentionnelle ???
Oui, c’était tout à fait intentionnel !!!
Mon père s’est toujours intéressé au terrorisme politique dans l’histoire humaine, et avait déjà été inspiré pour un de ses films de yakusas par la guerre d’Algérie dans les années 60…
De plus, cette scène de « Battle Royale 2 » résonne aussi comme les relations étranges qu’ont pu avoir les USA et les Japon par le passé…
La thématique du faible contre le fort est par ailleurs une thématique très importante pour moi.
Plus généralement, l’héritage du nom « Fukasaku » est-il difficile à porter pour vous, surtout lorsque l’on s’engage dans la même voie de cinéaste ?
Non pas du tout !… (Avec humour:) Comme mon père était un bon cinéaste, je n’ai jamais été embêté ! De plus, j’adore les films de mon père et c’est donc un honneur qui m’est fait de porter ce nom !!!
En 2006, vous réalisez un opus de la fameuse saga des « Sukeban-eigas» (films de yakusa au féminin, dans un style très pop et initiés à la fin des 60’s par des studios comme la Toei ou la Nikkatsu) avec votre « Yo-Yo Girl Cop »… Etiez-vous un fan de ce genre de productions mettant en scène des actrices telles que Miki Sugimoto, Reiko Ike, Meiko Kaji, Annu Mari, etc… ?
Oui, j’ai beaucoup de respect pour ces films réalisés pour la plupart dans les années 70. J’adore par exemple Reiko Ike !
Mais, vous savez, aujourd’hui les choses ont bien changé au Japon: sur les quelques 400 films produits annuellement (NDR: je pense que M. Fukasaku tient aussi en compte l’énorme masse de V-Cinéma, le marché vidéo), il y a seulement 10 films d’action !!!…
Voulez-vous dire que vous subissez une forme de censure actuellement ?
Pas vraiment… Mais désormais, les principaux investisseurs pour le cinéma nippon sont les chaînes de télévision qui préfèrent miser sur des comédies !
Par exemple, un metteur en scène comme Ryuhei KITAMURA est plus populaire en-dehors du Japon qu’à l’intérieur du territoire national !!! C’est très difficile de faire de purs films d’action au Japon !
Parlons maintenant un peu de votre dernier film, « X-CROSS »…Quelle en est l’origine ? Est-ce une histoire adaptée d’un manga ?
Non, il s’agit d’une histoire originale. Plusieurs réalisateurs ont été approchés avant moi pour le mettre en scène…
Je suis heureux d’avoir finalement été choisi, car j’adore le thème du film qui voit s’opposer le Japon moderne, avec les téléphones mobiles et toutes ces nouveautés technologiques, au Japon traditionnel ancré dans le folklore !
Pouvez-nous nous parler du choix des 2 actrices principales ?
Nao Matsushita, l’actrice qui interprète Shiyori, est la plus connue des 2 actuellement au Japon… Elle est également pianiste dans la vie.
Ami Suzuki, qui joue le rôle d’Aiko, est une « pop idol » très populaire également, il s’agissait pour elle de son second film en tant que comédienne et je suis très content d’avoir pu la diriger car je suis fan de ses chansons !
«X-Cross» fait irrémédiablement penser à l’univers du manga, notamment avec cette fille vêtue d’une robe rose bonbon qui réclame vengeance, armée d’une paire de ciseaux aux proportions de plus en plus démesurées !!! (-Note pour les « gamers »: ciseaux qui finissent par atteindre peu ou prou la même taille que l’épée du héros de « Final Fantasy VII !!!-) …
Oui c’est tout à fait exact, mais ce n’est pas un hasard car l’auteur de la nouvelle originale (Nobuyuki JOKO) fait partie de ma génération, et nous avons donc en commun la même culture pour les mangas…
Je trouve votre film très « fun » dans le sens où il réussit le difficile équilibre entre humour et horreur…
Eh bien, merci beaucoup. Mais pour ma part, je préfère la seconde partie du métrage, davantage tournée vers l’action !
Entretien réalisé le 2 avril 2008 lors de la 26ème édition du Festival International du Film Fantastique de Bruxelles (BIFFF).
Merci à Kenta FUKASAKU (« Mister Smiley ! ») et à Luk VAN HAUTE pour la traduction du japonais vers l’anglais.
Traduction de l’anglais: Alex Vasiljkic.
Special Thanks : Service Presse du BIFFF 2008, et en particulier Sylvie SCHMITZ et Marie-France DUPAGNE, nos « chaperonnes » du festival, mais aussi de sacrées blagueuses (tu n’as pas oublié ton 1er avril 2008, hein Wolfy ???…)
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