Cette année encore Cinealliance.fr était présent quelques jours au Festival Lumière qui s’achève aujourd’hui.
Dimanche dernier, dès l’arrivée à l’institut Lumière, petit tour à la 6ème édition du Salon du DVD qui met à l’honneur le travail éditorial des éditeurs de vidéo physique (DVD, Blu-ray, Ultra HD), l’occasion de rencontrer et de féliciter pour leur engagement et leur professionnalisme remarquables des éditeurs français comme The Jokers, L’Atelier d’images, Carlotta ou bien encore Roboto Films (tests brd à venir pour 2 titres de leur collection Gangsters).
En fin d’après-midi direction la projection de Sicario (2015) présenté par Benicio Del Toro lui-même, invité prestigieux de ce Festival Lumière 2024. Juste après la présentation de l’excellent polar de Denis Villeneuve, l’acteur, vu récemment dans Reptile (Netflix, 2023) et The French dispatch (2021), a dévoilé sa plaque sur le mur des Cinéastes rue du Premier Film.
Le lendemain Benicio Del Toro était à l’honneur dans une passionnante master class animée par Didier Allouch. Après avoir évoqué son expérience en class acting à l’université de San Diego (« Pour la première fois, je me suis senti exactement au bon endroit au bon moment. »), il a dévoilé un secret de tournage pour le thriller culte Usual Suspects (1995) : « J’ai réalisé que mon personnage mourait dès la page 37 du scénario. Tout l’intérêt du personnage était sa mort. Ce qu’il disait n’avait pas vraiment d’incidence sur l’intrigue. J’ai proposé à Bryan Singer, le réalisateur, ceci : « Ce que dit ce type n’a vraiment pas d’importance, si vous me le permettez, j’ai envie d’essayer quelque chose. Et il m’a dit : « Vas-y » ! Et j’ai eu la chance qu’il me suive. J’ai ajouté cette sorte de dialecte, de défaut de prononciation et cela m’a aidé à incarner ce personnage ». Il a ensuite parlé de son alchimie avec le réalisateur Steven Soderbergh qui lui a offert entre rôles mémorables le Che (récompensé par un Prix d’interprétation au festival de Cannes 2008) et Javier dans Traffic (Oscar du meilleur second rôle en 2001). Autre rôle marquant celui du Dr Gonzo dans le déjanté Las Vegas Parano (1998) de Terry Gilliam pour lequel l’acteur a pris beaucoup de poids : » Le gain ou la perte de poids ne font pas la performance. Jouer, c’est autre chose. J’ai vu le réalisateur Terry Gilliam avant le tournage de Las Vegas Parano, je n’avais pas beaucoup de temps pour prendre du poids pour incarner Gonzo. Je n’avais pas de nutritionniste, alors j’ai fait ma préparation un peu comme un « homme des cavernes » : j’ai mangé entre 14 et 16 donuts par jour, j’ai pris environ 1,5 kg par jour. Et quand vous mangé du gras, vous avec envie de gras, alors j’enchaînais avec du poulet frit. Maintenant, si je regarde un donut, je prends 1 Kg ! ». Très généreux avec le public Benicio Del Toro a répondu à de nombreuses questions variées de l’assistance, sur un film comme Traqué (2003) de William Friedkin, les conseils pour un acteur débutant ou la politique américaine actuelle.
Lundi dernier le réalisateur Costa Gavras qui a reçu un Prix Lumière spécial lors de la cérémonie d’ouverture du festival a rencontré le public lors d’une master class très attendue. Le réalisateur français d’origine grecque, auteur de Z et de L’aveu, est connu pour ses films engagés : « Tous les films sont politiques. Chaque spectateur réagit avec sa propre philosophie, ses propres sentiments. Ce qui se passe aujourd’hui dans le monde, vous le voyez à la télévision. Pour faire un film, il faut d’abord avoir une histoire, et l’aimer. Pourquoi ? Parce qu’on fait du spectacle. Le spectateur doit rire, pleurer, être furieux… ». De plus au sujet d’une demande de conseil pour découvrir son cinéma il a préconisé : « Si vous n’avez jamais vu aucun de mes films et que vous ne savez pas par quoi commencer, demandez-vous d’abord ce que vous cherchez. Si vous aimez les films d’action avec beaucoup de mouvement, je vous conseille Un homme de trop (1967), même si, avec le recul, je me dis que c’était un peu exagéré, et que l’histoire aurait pu être plus fouillée. Si vous préférez les films d’amour, voyez Clair de femme (1979), avec Romy Schneider et Yves Montand. C’est un film d’amour plutôt inhabituel, assez tragique ».
Costa Gavras a également présenté en avant-première son dernier film Le dernier souffle, adaptation du livre de Régis Debray et du docteur Claude Grange sur la fin de vie, un drame engagé, trop démonstratif, sauvé par un casting quatre étoiles dont Kad Mérad, Denis Podalydès dans les rôles principaux.
Pendant ces 3 jours nous avons pu également voir avec grand plaisir deux films de la rétrospective Fred Zinnemann, Acte de violence (1948), une pépite du film noir, une rareté dont la Warner a édité une copie spécialement pour le festival Lumière et Le Chacal, un haletant thriller à gros budget tiré du roman de Frederick Forsyth (1973). De plus nous avons découvert ce splendide Kurosawa qu’est L’ange ivre (1948), un drame mélancolique situé dans les bas fonds de Tokyo ravagé par la guerre avec Toshiro Mifune dont c’est la première collaboration avec le maître (16 films ensemble) et à qui le festival rendait hommage dans une belle rétrospective. Comme de tradition au Festival Lumière le film a été présenté par une personnalité du 7ème art, en l’occurrence Régis Wargnier, le réalisateur oscarisé d’Indochine, contributeur historique de cet incontournable festival dédié au cinéma classique, de patrimoine dont la popularité est toujours intacte au vu des salles remplies du matin au soir par des cinéphiles avides de découvertes cinématographiques et de partage avec de grands noms du cinéma.
