Moonee a 6 ans et un sacré caractère.
Lâchée en toute liberté dans un motel de la banlieue de Disney world, elle y fait les 400 coups avec sa petite bande de gamins insolents.
Ses incartades ne semblent pas trop inquiéter Halley, sa très jeune mère.
En situation précaire comme tous les habitants du motel, celle-ci est en effet trop concentrée sur des plans plus ou moins honnêtes pour assurer leur quotidien…
Film présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, dans le cadre du Festival de Cannes 2017
L’avis de Manu
Après le touchant Starlet et l’étrange Tangerine (dont nous étions moins fan que la critique internationale), Sean Baker revient avec The Florida Project.
Toujours à fleur de l’intime et du social, il filme au plus proche cette Amérique profonde, loin du soleil de L.A. et plus proche de celui de Floride. Ici, il contre-balance son récit dans un équilibre judicieux quant à la personnalité de ses protagonistes. Quand les réactions et chaque action de la mère ricochent sur les gestes et l’attention de ce gérant de motel, joué par un Willem Dafoe qui trouve ici un de ses meilleurs rôles récents. A la recherche de l’ultra réalisme tout en fuyant tout misérabilisme, Baker tend à peindre le plus sérieusement possible cette Amérique de l’invisible mais « constituée du peuple » tout en y adjuvant un regard touchant sur l’enfance, avec la dureté et l’innocence qui accompagne cette période. Construit sur de micro scènes balayées de précieuses séquences, The Florida Project fait partie de ces films au plus proche d’une lecture sociale radicale, comme touchante, dont les qualités de cœur transparaissent à travers leurs interprètes (révélation de la petite Brooklyn Prince).
Orné de couleur chaude dans un décorum floridien post 11 septembre (en résonance), le récit de Sean Baker, principalement filmé à hauteur d’enfants, est de ceux qui donnent au cinéma cette note réaliste immédiatement associée à l’émotion procurée par l’ensemble de cette formule. Contre-pied fabuleux à l’entreprise Disney dans son fond et sa forme, The Florida Project évite les poncifs du cinéma indépendant dont Sundance se fait parfois le stéréotype et inscrit un peu plus Sean Baker dans les réalisateurs à suivre, s’il tend à rester dans cette gamme de productions en tout cas. L’amateurisme des principaux comédiens contribuant évidemment à la réussite du film, sans que jamais le spectateur ne perçoive quoique ce soit. On zigzague entre moments d’émotions et d’énergie folle pour établir un tableau touchant de l’enfance, si loin si proche de l’innocence face à la dureté du monde adulte.
Comme un conte arty à la Dickens sous le soleil floridien.