Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt la Désolation à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Imperator Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles impitoyablement…
Film présenté hors-compétition au 68ème Festival de Cannes
Sorti en 1979, Max Max, réalisé avec un budget dérisoire par le débutant George Miller, un ancien médecin australien, marque le début d’une des plus réussies saga post-apocalyptique de tous les temps dont le second volet, daté de 1981, le meilleur, est resté dans toutes les mémoires : Mad Mel, un univers rugueux et désespéré, l’incroyable course-poursuite de 13′ avec des cascades automobiles inédites…
Trente ans après le troisième volet Mad Max : Au-delà du dôme du tonnerre, the mastermind George Miller porte à l’écran la quatrième aventure de l’iconique Mad Max, antihéros solitaire interprété cette fois-ci par Tom Hardy. Armé d’un budget poids lourd, Miller a pu réaliser, dans le désert de Namibie, un vieux rêve : une nouvelle aventure de Max Rockatansky dont la forme serait une course-poursuite quasi-interrompue de deux heures avec des cascades jamais vues au cinéma, des centaines de véhicules, des explosions dantesques et un personnage toujours aussi bad-ass.
Innervé par la passion de son réalisateur pour l’énergie cinétique et une exaltation toujours renouvelée pour orchestrer des séquences d’action pleines de bruit et de fureur inédites, Mad Max : Fury Road est un incroyable, ébouriffant film d’action avec des séquences d’anthologie qui vous scotchent au fauteuil grâce à un découpage brillant avec ampleur des collisions automobiles et nervosité des affrontements où la tôle froissée, les corps meurtris volent dans un ballet halluciné de destructions où la survie est le mot clé. Le rythme est effréné, furieux; heureusement entre deux équipées sauvages les personnages parviennent à exister, dessinés par petites touches précises et efficaces.
Avec une ingéniosité dans l’orchestration du chaos et un savoir faire technique écrasant la concurrence (les récréations hollywoodiennes fast and furious), George Miller a orchestré une poursuite de dingue gorgée de plans hallucinants avec des cascades réalisées sur le set et des effets pyrotechniques à l’ancienne. Y rôde une constante sensation de danger pour ces personnages incarnés par des acteurs et des cascadeurs lancés à toute vitesse (le fonds vert ce n’est pas le genre de la maison!) sur les pistes de décors naturels superbes. Le recours aux images de synthèse, pour une homérique tempête de sable ou quelques plans sur le repère de la Citadelle, est au service de la narration et n’entache pas la promesse d’un cinéma viscéral et organique dans la lignée de la trilogie dont l’ampleur des scènes d’action de ce nouveau volet relève du jamais vu. On retrouve dans Mad Max : Fury Road l’intérêt de George Miller, ancien interne en traumatologie, pour la représentation du corps malade : tumeurs, scarifications, amputations; le motif du traumatisme corporel, de son hybridation avec la présence de métal et autres prothèses (le bras artificiel de l’impératrice Furiosa, l’appareil respiratoire d’Immortan Joe) s’étend au design des véhicules, tous transformés, assemblage de châssis et autres pièces disparates.
Parmi cette incroyable galerie de freaks et de personnages délirants évoluent et tentent de survivre quelques rebelles en quête de liberté, certains de rédemption : l’impératrice Furiosa et ses protégées, anciennes esclaves sexuelles d’un dictateur dégénéré, Mad Max, anti-héros solitaire emporté malgré lui dans leur fuite en avant. Max, interprété par le charismatique Tom Hardy, côtoie ainsi une beau groupe de femmes fortes, rebelles, emmenées par la guerrière Furiosa, alter-égo féminin du road warrior joué avec son intensité coutumière par Charlize Theron.
Attendu avec fébrilité par tous les fans de la mythologie Mad Max, ce quatrième opus, toujours réalisé par George Miller, est une expérience hallucinée et hallucinante aux prises de vues incroyables, un opéra de violence et de destruction sidérant et tétanisant. What a lovely day!
Avis de Manu :
Si certains évoquent le 7ème art comme un avant et un après Sergio Leone (utilisation de certains gros plans), pour l’exemple, le cinéma d’action aura lui son avant et après George Miller, sur au moins les 20 dernières années.
L’opéra rock désiré par le metteur en scène aura bien lieu et la déception souvent affiliée à l’attente suscitée par le film (fait des objets cinématographiques et iconiques) ne verra jamais pointer le bout de son nez.
Fort de son imagerie punk et post apocalyptique, sans jamais oublier son ornement écologique, les trois premiers épisodes de la série avaient marqué de façon persistante l’aube des années 80. Un personnage était né, sous les traits d’un Mel Gibson sur lampe de lancement d’une grande et faste carrière. George Miller, toujours maître de l’ensemble de son œuvre (exception faite peut-être du 3ème épisode), imprègne avec une force principalement visuelle, tout un pan subtil de réflexion, presque spirituelle, comme toujours (très sérieusement, il convient même de faire un détour par Babe, oui c’est lui aussi) pour voir la finesse d’écriture, pas si simple, que Miller tant toujours à employer.
Presque 30 ans plus tard, Max Rockatansky revient sous les traits du charismatique Tom Hardy, expressif au maximum, en en faisant le minimum. Et vu la carrure et le jeu du comédien, le choix s’avère parfait. Et plutôt que de créer un reboot, sinon un remake de l’œuvre originale, George Miller fait habilement muter les squelettes et chairs du passé avec les cellules d’un cinéma contemporain qui, techniquement avant tout, lui accorde une plus grande liberté, et même plus. En résulte une œuvre parfaite d’unité, dans une équation équilibrée entre sens et forme, d’une cartographie ayant pour destination l’enfer du désert. Sur ce point, la virtuosité de Mad Max : Fury Road est ce qu’on ait vu de mieux depuis des années.
Créer un mythe n’est jamais facile, et l’inscrire dans une époque, souvent la suite de facteurs hasardeux. Le renouveler, n’est pas contre que la force d’un talent et fruit d’un travail immense.
Mad Max : Fury Road est une déflagration dans le cinéma d’action, non seulement par l’intensité et la virtuosité qu’il dégage, mais par sa modernité et l’intemporalité nées de sa forme.
Le film n’est pas exempt de plans numériques bien sûr, on trouve ainsi de nombreux effets. Mais la différence et l’ADN même de Mad Max restent toujours et encore cette magnifique propension de George Miller à imposer dans un bruit de fureur et de folie, le choc du viscéral, de tout ce que peut représenter (et contenir) une carcasse rutilante, moteur V8 pleine puissance. Ces monstres de fer qui, à une époque où les pixels n’existaient pas pour défier les lois de l’apesanteur, viennent s’entrechoquer, se dévorer et s’affronter brutalement dans un effet de masse spectaculaire, protéiforme. Sorte de cinéma plus véridique que vérité, à une époque où le tout numérique vient souvent bafouer toute once de crédibilité au nom du grand spectacle, certes époustouflant, mais parfois totalement foireux et peu crédible (Fat and Curious quand tu nous tiens). Les explosions résonnent de leurs ondes odorantes jusque dans la salle quand les étincelles d’acier viennent nous faire cligner les yeux. On reste étonné (et tant mieux) qu’aucun cascadeur ne se soit blessé sur le tournage. C’est simple nous sommes en face la version cinématographique du cirque moderne et anarchique, post punk sinon gothique version 2.0.
Et dans ce road-trip(-halluciné-)movie, tout est impressionnant de mise en scène, les caméras (jusqu’à 10 sur certaines séquences) viennent capter les instants magiques d’une course-poursuite en forme de western post apocalyptique. On retient également le montage au cordeau, qui devrait servir d’exemple et devenir un cas d’école pour tous les « want to be » hollywoodiens, drogués au montage épileptique et au cut cut cut ; clip MTV en guise de bible.
D’une démesure esthétique punk et destroy hypnotisante, l’aspect motorisé des véhicules (chaque « monstre » semble être un personnage en soi) répond à la laideur du monde, composée de personnages exorbitants, entre folie et bestiaire de despotes et d’esclaves armés.
Les détails (matériel, mode de vie, projection de vie future, hiérarchie sociale…) apportent également avec finesse encore plus d’impact à ce monde.
Tout est donc réuni visuellement pour faire de ce nouveau Mad Max un pur chef d’œuvre de genre.
Scénario absent ? tout l’inverse, sur un postulat réduit à son minimum certes, George Miller retranscrit au mieux ce qu’il a toujours réussi et voulu faire. Sa foi en l’espèce humaine est encore et toujours comme contrepoint d’un monde qui s’étiole petit à petit sur le plan écologique et destructeur. Facile, oui, mais intelligent, très certainement. Les dialogues, plutôt rares, semblent rugueux, réduits à leur minium et l’éclectisme de ton et la forme spécifique de chaque réplique contribuent à composer et imposer encore plus le caractère des personnages.
A ce titre, Max semble peut-être moins présent à l’écran, effacé, que Mel Gibson pouvait l’être dans les précédents opus de la franchise ; mais Tom Hardy est parfait (voix géniale), charismatique et joue brillamment une composition que certain aurait transposé en cabotinage. Le metteur en scène a eu la bonne idée de ne pas en faire son sujet mais de l’inclure dans un ensemble qui fait un tout.
Ce tout, ce convoi, en éternel mouvement, est la métaphore de notre société qui doit probablement tenter de consolider les bases de son passé, se souvenir de son histoire, plutôt que de s’en échapper par des rêves idéologiques, sous le règne du tout polluant.
Et que dire de la présence de Charlize Theron, excellente dans son rôle. Le film deviendrait alors féministe selon certains, c’est plus vers une notion d’humanisme et d’égalité que tend la proposition de George Miller.
Encore plus important, il propose à nouveau une de ses idées (d’universalité ?) où de l’éclatement d’une société, totalitaire, lors d’une poursuite à presque…360 degrés (on vous laisse la surprise), en naîtrait une autre, formée sur le principe de l’éclectisme et la pluralité sociale. Composé d’une femme-soldat et soutenu par un guerrier-sentimental ; autour, de femmes, de filles, même un membre de la « confrérie » ennemie. Seulement brutal et visuel disent certains. Pas vraiment !
Mythe devenu légende fictionnelle, Mad Max revient donc pas la grande porte, comme un livre déjà lu, s’ouvrant sur un autre chapitre du même univers. Nouveau et ancien à la fois, habillement dessiné en résonance de son époque (il sera difficile de dépasser la notion de blockbuster pyrotechnique après ça), c’est une déflagration étonnamment cinématographique qui jaillit devant nos yeux. Comme un trip d’adolescent qui reprend vie (merci pour ces belles années de découvertes plurielles dans les vidéoclubs qui nous reviennent en mémoire), d’une BD version comics qui semble prendre vie avec maturité (le côté décalé de la trilogie est présent) dont on ne trouverait aucun équivalent.
Très rare sont les films qui avec le savoir-faire des années 80 passent le cap des années 2000.
Toujours sur le chemin de la rédemption, Mad Max sous l’œil finement intime de George Miller reprend vie, comme pour nous chuchoter, nous confirmer que finalement ces pimp my furious fast car ne sont pas grand-chose et que les super héros ne font toujours pas le poids face au héraut des temps modernes. Finalement dans la sueur, la modernité, la folie, la rage, le rock, l’intelligence et une certaine forme de pensée universelle peuvent émerger, sinon revivre, les meilleures œuvres. Et lorsque qu’un maître est au volant, la notion de chef d’œuvre peut-être émise.