Avant Amityville, il y avait Harrisville… Conjuring : Les dossiers Warren, raconte l’histoire horrible, mais vraie, d’Ed et Lorraine Warren, enquêteurs paranormaux réputés dans le monde entier, venus en aide à une famille terrorisée par une présence inquiétante dans leur ferme isolée… Contraints d’affronter une créature démoniaque d’une force redoutable, les Warren se retrouvent face à l’affaire la plus terrifiante de leur carrière…
L’avis de Manu Yvernault :
James Wan s’est fait connaître sur la scène internationale avec Saw, depuis, il a su garder une certaine indépendance en ne réalisant que des projets « personnels » inscrits dans un même genre, mais ultra référencés; se référer aux sous estimés Death Sentence et Dead Silence. Son précédent long, Insidious, pêchait peut-être par excès mais la qualité de la mise en scène était présente.
Cette fois avec The Conjuring, tout semble réuni pour mettre le réalisateur sur l’avant-scène.
Le film d’horreur, usité à force d’être souvent servi à toutes les sauces, surtout les plus aigres, a finit par rendre le genre banal, voire parodique, si ce n’est ennuyant parfois, sinon ridicule. Bref, les productions ne savent plus comment se renouveler.
The Conjuring offre donc une alternative plus qu’intéressante et James Wan en apporte les codes avec le style et la manière.
Avant tout le réalisateur démontre qu’on peut réaliser un film totalement effrayant sans passer en mode gore (qu’on apprécie parfois dans un tout autre contexte) ou de la violence gratuite à chaque séquence, preuve d’une certaine maturité venant du réalisateur de Saw ! Ensuite, James Wan place les peurs du spectateur à des origines presque freudiennes, le noir, l’illusion, l’imperceptible, l’inconnu gravitant autour de l’angoisse ; le spectateur inconsciemment aime être bousculé sur ces points. Naviguant quasiment des premières minutes du film jusqu’au plan final sur les terres de la possession dont les codes sont bien connues du spectateur, il instaure un rythme frénétique à son œuvre, en parsème régulièrement des séquences d’une mise en scène ultra maline avec des cadres soignés. Les codes du genre ayant déjà été digéres, il a su les détourner pour se les réapproprier, à ce titre la séquence « qu’y a-t-il sous le lit ?» est presque un must.
Là où les précédents films du metteur en scène pêchaient sur le plan émotionnel, The Conjuring rattrape complètement l’écart. Les comédiens sont tous parfaits dans leur rôle et les nombreux enfants du film contribuent à une véracité de ton. Le spectateur passe ainsi aisément du plan fictionnel à fausse réalité, le film étant basé sur des faits réels. Atout pour un long métrage qui surf sur la vague esprit démoniaque et exorcisme.
Patrick Wilson et Vera Farmiga forment un couple très convaincant. L’ensemble du casting des enfants oscille entre authenticité et subtilité de jeu. Ainsi, on ne tombe jamais ou rarement dans les pastiches du genre sur ce point. Quant à Lili Taylor, elle impressionne toujours autant par l’intensité de son jeu; à ce titre, la deuxième partie du film qui se centre de plus en plus autour d’elle est portée par son interprétation.
Si la réussite du film est au rendez-vous c’est surtout grâce à la mise en scène très efficace de James Wan. Son sens du cadre, l’habilité qu’il a à renouveler la forme du genre, autant dans sa scénographie que dans sa réalisation, tout cet ensemble pousse le film hors des sentiers déjà-vu du genre. Il révise les classiques (La malédiction, L’exorciste), sans les surpasser bien sûr, apporte une efficacité propre au film à défaut d’y trouver un véritable renouveau.
Peu importe, le résultat est là, il a réussi un film au rythme frénétique où les « jumpscares » sont au rendez-vous, mais pas forcément là où on les attendait. James Wan connaît les règles par cœur du cinéma dans lequel il officie, il sait également que le spectateur tout comme lui à vu déjà un catalogue entier de films sur ce genre. Il décide donc souvent d’ingénieux contre-pieds de mise en scène, de guider le public là où il ne l’attend pas. Cette manière simple et efficace de porter le film de son début à sa fin rend The Conjuring diablement effrayant. Le fait d’installer la mise en scène d’une séquence et de ne pas la terminer comme on l’a trop souvent vu en rend le film plus stressant. C’est parfait pour procurer au film ce petit plus dont le genre avait besoin.
Au final, The Conjuring, s’il manque d’originalité dans son histoire, fonctionne plus que tout autres films récents par sa mise en scène, référencée, plutôt mâture et ingénieuse. Comme ci James Wan tentait de jouer avec le spectateur. En le respectant de la sorte, en ayant conscience de ne pas répéter ce qui a déjà été fait par facilité, le réalisateur livre un des films les plus efficaces du genre ces dernières années.
On ressort du film avec le plaisir d’être passé des sourires crispés aux réels moments de frayeurs, finalement classiques mais démoniaques de possession.