Se rendant dans la petite ville de Spoleto, près de Pérouse, pour des travaux d’études, un ornithologue allemand s’installe dans une propriété isolée au milieu d’un parc immense, abandonnée par les derniers occupants depuis plusieurs années. Au cours d’une de ses promenades, il découvre des bandes magnétiques dissimulées derrière des buissons et entreprend de les écouter. Il entre ainsi dans l’intimité d’Azzurra, jeune femme perturbée à la sexualité déviante, qui se confie à son psychiatre. Le scientifique ignore que la découverte de ces bandes le met en danger de mort.
L’avis de Margaux
Amour et Mort dans le jardin des dieux est l’unique film dirigé par Saura Scavolini, il est produit par son frère Romano Scavolini, réalisateur de L’Exorcisme tragique (1972). A première vue, Amour et mort dans le jardin des dieux s’inscrit dans cette belle tradition du giallo italien à utiliser de longs titres poétiques, on pense bien à l’inoubliable Ton vice est une chambre close dont moi seule ai la clef (1972) de Sergio Martino ou au plus actuel L’Etrange couleur des larmes de ton corps (2014) de Hélène Cattet et Bruno Forzani.
Le film de Scavolini n’est d’ailleurs pas vraiment un giallo à proprement parler. Ici, les scènes de meurtres ne sont pas centrales. Le film s’ouvre sur le cadavre d’une jeune femme nue dans une baignoire, la mise à mort a déjà eu lieu. Les éléments du giallo vont plutôt se trouver dans le cheminement de l’intrigue. Un ornithologue s’installe dans une villa isolée pour mener à bien des études sur les oiseaux. Après une promenade, il tombe sur des bandes enregistrées qu’il écoute une fois rentré. Il découvre ainsi les séances de psychanalyse de l’ancienne propriétaire de la demeure. A la manière de Blow-up de Michelangelo Antonioni qui influencera grandement cette part du cinéma transalpin, l’intrigue se lance dans une phase de déchiffrement. C’est aussi grâce à une bande magnétique que le protagoniste de L’Oiseau au plumage de cristal résoudra l’énigme posée par le meurtre d’ouverture. Les bandes magnétiques et la psychanalyse sont également le sujet du Venin de la peur de Lucio Fulci avec le personnage à double visage incarnée par Florinda Bolkan. Dans Amour et mort dans le jardin des dieux les enregistrements vont permettre au vieil homme de comprendre les circonstances de la mort de la jeune femme. Une série de flash-back va alors structurer le film.
Dans une première partie très langoureuse et introspective, nous suivons Azzura, la propriétaire de la villa. Le film se concentre sur la relation presque incestueuse entre elle et son frère. Le rythme lent prend ainsi le temps de présenter les personnages et les lieux. L’histoire se déroule dans un milieu rural quasi désaffecté; des belles séquences mettent en scène Azzura courant dans des ruelles totalement déserte. Si cette première partie a parfois tendance à s’étirer, la brusque révélation va faire basculer le film dans un tout autre registre. Le vieil homme découvre la vérité sur la mort d’Azzura et les éléments vont ainsi revenir dans l’intrigue sous un autre angle. Le suicide présumé d’Azzura va dévoiler tout autre chose. Le film se termine sur une chasse contre la montre assez palpitante entre l’ornithologue et l’assassin. Dans une scène particulièrement réussie le vieil homme écoute sur la bande magnétique le meurtrier qui s’adresse directement à lui pour lui annoncer sa mort imminente.
L’ambiance générale du film flotte entre poésie et érotisme. Le travail du directeur de la photographie qui accentue cette dimension est particulièrement réussi. De surcroît, le travail de restauration du Chat qui fume magnifie les séquences d’extérieur dans la végétation environnante avec ses couleurs vertes éclatantes.
Le film de Saura Scavolini est passé inaperçu dans une époque où le genre était très prolifique. Cette sortie permet ainsi de découvrir un film rare qui mérite d’être vu. Malgré quelques défauts de rythme et de narration, Amour et mort dans le jardin des dieux est à ajouter dans sa liste de collection d’exploitation italienne.
Technique
Côté image, Le Chat qui fume fournit, une fois de plus, un très beau travail de restauration. On s’en rend compte dès l’ouverture du film avec les images du jardin de la villa. Les couleurs resplendissent et les détails sont très propres.
Côté son, les dialogues sont un peu étouffés mais n’empêchent pas la compréhension du film. Seule la version italienne est disponible.
Bonus
Deux interviews sont disponibles en bonus : dans « Rites d’amour et de mort » on retrouve Erika Blanc (Azzura) qui raconte des anecdotes autour du film et la manière dont elle a vécu le tournage (20′) et dans « Au jardin des orchidées » c’est Orchidea Santis qui nous parle du film et évoque ses souvenirs de jeune actrice (27′).