Au cours d’un voyage en solitaire à travers l’Océan Indien, un homme découvre à son réveil que la coque de son voilier de 12 mètres a été percée lors d’une collision avec un container flottant à la dérive. Privé de sa radio et de son matériel de navigation, l’homme se laisse prendre dans une violente tempête. Malgré ses réparations, son génie marin et une force physique défiant les années, il y survit de justesse. Avec un simple sextant et quelques cartes marines pour établir sa position, il doit s’en remettre aux courants pour espérer se rapprocher d’une voie de navigation et héler un navire de passage. Mais le soleil implacable, la menace des requins et l’épuisement de ses maigres réserves forcent ce marin forcené à regarder la mort en face.
Film présenté hors compétition au 66ème Festival International de Cannes
L’avis de Fabien
Après l’excellent Margin call sur les requins de Wall Street, J.C Chandor nous plonge dans un intense survival maritime avec All is lost. Roberd Reford y est le seul personnage de ce film quasiment sans dialogues centré sur les mésaventures en mer d’un homme dont nous ne connaissons pas l’identité pas plus que le passé et les motivations qui l’ont poussées à cette aventure en solitaire.
Le récit est composé d’une succession d’épreuves techniques et humaines auquelles le marin doit faire face suite à l’avarie de son navire de plaisance : colmater une brêche dans la coque, installer un fog de tempête sur une mer déchaînée, récupérer le matériel de survie dans un bateau sur le point de sombrer, produire de l’eau potable, tenter de se faire secourir par un cargo…
Sur la base d’un canevas scénaristique aussi mince, J.C Chandlor relève le défi de ne jamais ennuyer le spectateur. Il réussit, grâce à une mise en scène efficace (les scènes de tempête sont impressionnantes) relayée par des effets sonores percutants mais surtout en s’appuyant sur la performance mesurée du charismatique Redford à nous faire vibrer pour cette touchante aventure humaine. L’icône hollywoodienne, le visage meurtri, homme seul ballotté par les flots déchaînés, privé de nourriture et abandonné de tous, trouve ici un de ses meilleurs rôles.
Entre Seul au monde et En pleine tempête, All is lost vaut la peine de s’embarquer dans les salles aux côtés de Robert Redford.
L’avis de Manu Yvernault :
Il y a deux ans, le premier film de J.C. Chandor, Margin Call, avait fait son petit effet en nous narrant dans un style docu-fiction les 24 heures ayants entourées la crise de 2008 chez Lehman Brothers. Fort de son casting, la mise en scène du jeune cinéaste semblait déjà semée ses graines.
Avec All is lost, le réalisateur confirme tout le bien qu’on pensait de lui. Aux premiers abords, difficile de voir le pont entre son premier et deuxième long métrage. Et pourtant, à creuser de plus près c’est en pleine mer, perdu, que Robert Redford représente une fois de plus pour le metteur en scène, une critique de la société capitaliste.
Cette fois il prend en plus le temps de nous conter une histoire d’homme.
J.C. Chandor ne change pas de cap. Il convoque dès la deuxième séquence l’intelligence et l’imagination du spectateur (le Cinéma serait-il de retour ?), et se base sur le simple fait de ne rien raconter, ne pas donner toutes les explications qui pourraient caractériser son personnage. On ne sait pas d’où il vient, qu’il y est, ce qu’il fait là…c’est le prologue de tous les possibles, qui donne finalement une force encore plus présente à l’unique (ou presque) personnage du film, joué par Robert Redford. Mêlant assez rapidement les éléments du drame à celui du thriller, le film installe une tension au fur et à mesure du récit. Si son pitch très simple pouvait faire craindre un manque de rythme, il en est tout autre et ce grâce à sa mise en scène.
Toujours cadré avec la démonstration constante de mettre en avant son personnage, nombreux sont les plans serrés, bien que toujours « aérés » par le fait de l’inclure dans l’immensité de l’étendue maritime. Le film est relativement impressionnant dans l’audace qu’il déploie. En sortant d’un carcan classique, aucun dialogue, accumulation des problèmes sur le navire qui pourrait pousser à trouver certains retournements assez gros, J.C. Chandor créer l’intime dans l’infiniment grand, afin de se sentir au plus proche de son personnage, un navigateur perdu en pleine mer sous les traits de Robert Redford, qui doit probablement être un des plus grands acteurs du cinéma encore en activité. Bien que les dernières apparitions du comédien n’avaient pas marqué les mémoires, on peut dès lors considérer que All is lost s’affirme comme la plus belle prestation de l’acteur depuis des années.
Son personnage en répondant avec un calme constant à tout ce qui lui arrive, parvient à nous parler, nous raconter son passé, ce même passé que chaque spectateur sera à même d’imaginer. Cela renforce pleinement sa prestation, l’attachement au personnage, et le fait de passer outre la crédibilité des problèmes auxquels il doit faire face (sans doute le seul point faible du film). Pour le reste, toute la crédibilité est là, en mode survival, Robert Redford ne lâche rien et donne le meilleur de lui-même pour chacune des scènes, ou quand le charisme rime avec talent.
Jouant habilement de l’âge de l’acteur, le réalisateur sans tricher inscrit les contours de son personnage en adéquation avec ceux du comédien. Brillant, toujours magnétique, Robert Redford porte le film à bout de bras et déploie une énergie (de jeu et physique) pour donner vie et corps à ce navigateur qu’on pense finalement connaître au bout du voyage. Le fait de n’avoir aucun dialogue laisse tout le plaisir visuel pour découvrir l’immense prestation du comédien (excepté une voix off en début de film et quelques tirades jetées en pleine mer).
Si on pouvait être surpris par le thème abordé du second film de J.C. Chandor, on se ravise très vite quand la scène de fin vient répondre au prologue, dans une critique imagée de notre société capitaliste (on vous laisse le découvrir les détails subtils de la mise en scène sur ce point).
All is lost sous sa parure de « conte de survie » délivre la parfaite allégorie d’une (de la ?) vie.
Autant par le message spirituel qu’il renvoie, que l’épreuve physique que le personnage subit, le film borde les voiles de l’expérience cinématographique. C’est la conjugaison d’une mise en scène soignée, précise, au talent d’un comédien qu’on aime tant voir. Comme-ci l’appel au secours en pleine mer était un simple rappel de son talent avant qu’il ne disparaisse, au plus proche de bientôt 50 années de carrière. Probablement une façon élégante de nous suggérer que la statuette dorée pourrait enfin être attribuée à Robert Redford pour un premier rôle. D’ici là, certains refuseront d’embarquer, cela serait rester à quai, ignorer un voyage qui sous des allures d’ennui, ressemble terriblement à une ode à la vie.
Test blu-ray
Technique
L’image, très convaincante, révèle une compression de haute volée qui restitue sans problème des textures et des éléments difficiles à appréhender en vidéo comme l’eau, la pluie et la l’obscurité. Le travail sur le son est remarquable, plein de détails avec de surcroît des basses impressionnantes lors de la séquence de tempête; le récit étant quasiment dépourvu de dialogues la bande-son a en effet été finement travaillée pour restituer l’horreur de la situation vécue par le personnage de Robert Redford.
Bonus
Trois courts modules promos composent l’interactivité de cette édition hd Universal.
« All Is Lost : l’histoire » (4′)
Le réalisateur J.C Chandor, entre autres intervenants, explique sa vision du film et ses intentions à savoir « arriver à mélanger ces deux choses : divertir et passionner les gens mais aussi leur parler de l’essence de l’homme ».
« L’acteur : Robert Redford » (4′)
Robert Redford se révèle totalement investi dans ce rôle exigeant sur le plan physique et psychologique, écrit spécialement par J.C Chandor.
« Le réalisateur : J.C. Chandor » (3′)
Concert de louanges pour ce réalisateur très préparé, méticuleux (le film a été intégralement story-boardé) et efficace qui malgré un petit budget livre une aventure humaine marquante.