Après le remarqué L’orphelinat (2007) le réalisateur espagnol Juan Antonio Bayona passe à la vitessse supérieure pour son second film ; interprété par deux pointures (Naomi Watts et Ewan Mac Greggor) The impossible est le récit dramatique, basé sur une histoire vraie, d’une famille prise dans le terrible tsunami de 2004 en Thaïlande.
Ultra-réaliste la première partie de The impossible consacrée au déroulement de cette catastrophe naturelle est un peu ce que Il faut solder le soldat Ryan est au film de guerre : une expérience de l’horreur, immersive, redoutable, inoubliable. La séquence du raz-de-marée est en effet vraiment bluffante de réalisme douloureux grâce à un mélange de prise de vues réelles, d’effets sonores dévastateurs et des acteurs remarquables qui donnent visiblement beaucoup d’eux. A côté la mise en scène de ce même évènement traumatique dans l’Au-delà de Clint Eastwood parait bien pauvre avec ses images de synthèse peu convaincantes et son montage placide.
La suite du long-métrage consacrée à la tentative de survie et de retrouvailles de la famille séparée par cette énorme déferlante est tout aussi intense notamment grâce au jeu exceptionnel de Naomi Watts, sans doute l’actrice contemporaine la plus simplement émouvante. Bayona, pris à quelques reprises en flagrant délit de flirt avec le pathos (musique emphatique, mise en avant pas toujours mesurée dans ses effets dramatiques de l’innocence des enfants vs l’horreur de la situation), réussit ce grand film cathartique en se reposant sur son plus efficace vecteur d’émotion, la Watts, une nouvelle fois renversante.
Protégé de Guillermo Del Toro, dont L’Orphelinat avait mis en avant son talent de metteur en scène, Juan Antonio Bayona s’attache à reconstituer l’histoire vraie d’une famille lors du tsunami de 2004.
Si en premier lieu le sensationnalisme et le pouvoir réaliste de la mise en scène de Bayona subjuguent, le film n’arrive toutefois pas à emporter le spectateur sans emprunter certains chemins à l’aube de la facilité lacrymale.
En outre, le réalisateur à un indéniable talent de conteur et de metteur en scène. En premier lieu, son désir de laisser plus de place aux effets mécaniques que digitaux donne à l’ensemble du film cette hauteur que de rares films catastrophes peuvent atteindre.
Il transmet également dans la représentation de cette réalité toute l’horreur (visuelle et psychologique) que les protagonistes ont subit. C’est précisément dans ces moments que le spectateur impliqué et projeté à leurs côtés, se sent le plus compromis, proche de la douleur. Si on ne peut se projeter dans ce vécu, en lieu et place, le malaise est très présent.
Tout pourrait être parfait si le penchant mélodramatique du metteur en scène ne voulait reprendre le dessus (comme parfois dans l’Orphelinat). Dans ses quelques écarts maladroits, Bayona pousse ses élans dramatiques à leur maximum, musique en soutient, et annihile l’effet escompté à chacun de ces mouvements. Alors que la sobriété et la délicatesse dont il faisait preuve en début de métrage auraient été juste et efficace, une mise en scène copiée (inspirée ?) de Spielberg (années 90) vient fragiliser les fondations de l’édifice. Effet d’autant plus gênant que le jeu des acteurs suffit amplement à la réussite dramatique du film. Hélas, cette mise en scène appuyée à certains moments nous sort de la force naturelle du récit (spoilers : le parcours croisés des membres de la famille dans l’hôpital est à la limite de la crédibilité).
Malgré un final très larmoyant, The Impossible inscrit Bayona dans les grands conteurs de son époque. A défaut de devenir un cinéaste classique il montre enfin l’étendu de son talent mais est trop souvent rattrapé par un sentimentalisme mal venu. Reste la grandeur de l’ensemble avec certaines scènes majestueuses et des comédiens immaculés qui nous font croire en chaque instant à l’épreuve que cette famille a du traverser.
Des instants d’immersions et d’émotions, même entrecoupés de facilités, qui laissent de fortes émotions ancrées en chacun de nous, et ce, de longues heures après cette déferlante de réalisme et d’intensité.