Jamal Malik, 18 ans, orphelin vivant dans les taudis de Mumbai, est sur le point de remporter la somme colossale de 20 millions de roupies lors de la version indienne de l’émission Qui veut gagner des millions ? Il n’est plus qu’à une question de la victoire lorsque la police l’arrête sur un soupçon de tricherie.Sommé de justifier ses bonnes réponses, Jamal explique d’où lui viennent ses connaissances et raconte sa vie dans la rue, ses histoires de famille et même celle de cette fille dont il est tombé amoureux et qu’il a perdue.Mais comment ce jeune homme est-il parvenu en finale d’une émission de télévision ? La réponse ne fait pas partie du jeu, mais elle est passionnante.
L’avis de Fabien
Après son brillant film de S-F Sunshine, l’éclectique Danny Boyle (Trainspotting, La plage, 28 jours plus tard) est de retour avec surprise, l’adaptation d’un d’un roman indien de Vikas Swarup « Les Fabuleuses aventures d’un Indien malchanceux qui devient milliardaire ».
Après un long séjour en Inde de plusieurs mois pour repérer les lieux et trouver son casting, le réalisateur britannique a tourné entièrement en décors naturels dans ces bidonvilles (slums) où les équipes occidentales ne s’aventurent jamais.
Pour capter la vie qui grouille dans ces lieux miséreux les techniciens ont utilisé le dernier cri en petite caméra numérique comme la Canoncam, un appareil photo capable de prendre 12 images par seconde.
On retrouve dans ce conte à la Dickens transposé à Bollywood l’indéniable sens visuel de Boyle. Dès l’ouverture sa caméra bondissante colle aux basques de son jeune héros pourchassé par la police dans le dédale d’un bidonville et enregistre les couleurs saturées (beau travail du chef op Anthony Dod Mantle), l’agitation permanente des habitants, l’incroyable énergie comme la misère qui se dégage de cette Inde contrastée bien loin de la représentation exotique de carte postale que renvoyait récemment le dernier film de Wes Anderson A bord du Darjeeling Limited centré, il est vrai, sur le point de vue d’Occidentaux en visite.
S’appuyant sur le formidable talent d’ acteurs locaux, professionnels (Dev Patel et Anil Kapoor sont des stars dans leur pays) comme novices (les plus jeunes sont d’un naturel bouleversant), Boyle raconte, sur un rythme échevelé en accord avec l’énergie de l’Inde du XXI ème siècle, le parcours incroyable, chargé en péripéties et situations dramatiques, d’un jeune garçon des bidonvilles aux plateaux de télé.
Son scénario repose sur un schéma narratif que d’aucuns jugeront simpliste et répétitif consistant en une succession de question/flashback. Accusé de tricherie, Jamal subit, avant la finale, un interrogatoire policier tendu où il associera sa connaissance des réponses aux souvenirs de son enfance agitée. Mais les personnages sont si attachants et chaque histoire si riche sur le plan dramatique et visuel que cette ossature scénaristique un peu rigide est vite acceptée.
En dosant habilement un style percutant avec les attributs du film Bollywood (explosion de couleurs, romance mélodramatique, situations picaresques…) Boyle livre un film passionnant entre comédie, drame et action, virevoltant, plein d’émotions mais jamais racoleur, ni misérabiliste en relatant les contradictions d’un pays en pleine mutation où les très pauvres côtoient les très riches (voir la scène mémorable de la rencontre entre Jamal et son idole de cinéma) et où un orphelin pauvre se retrouve par amour sur les plateaux de la plus populaire des émissions.
Il se dégage de ce conte romanesque à la fois drôle et tragique, terrifiant et enivrant une énergie communicative et une forte puissance émotionnelle qui ont été justement récompensés par 8 Oscars.
Alliée à une riche bande-sonore, l’image ravit par ses couleurs éclatantes et contrastes marqués qui s’accompagnent d’un léger grain cinéma voulu par Danny Boyle qui s’explique avec enthousiasme dans un commentaire audio sur son choix d’employer de petites caméras HD pour se faufiler dans les les ruelles des bidonvilles de Bombay comme de son travail avec les jeunes comédiens.
Un making-of scindé en deux modules d’une quinzaine de minutes révèle l’envers du décor de ce film tourné en terre inconnue pour l’équipe de Danny Boyle qui s’exprime à côtés du scénariste Simon Beaufoy et du directeur de la photographie Anthony Dod Mantle.
On retrouve un Danny Boyle passionné par son sujet dans l’interview menée par Laurent Weil pour Canal+ (26mn).
Douze scènes coupées ou en version longue (35’) sont également à visionner : l’adolescence de Jamal ou les rapports complexes entre les deux frères y sont développés.
« Du script à l’écran » (6’) : Boyle décortique la scène (ses intentions, son sens) de l’arrivée en hélicoptère de la star indienne Amitabh Bachchan, l’idole du petit Jamal coincé dans les toilettes du bidonville de Mumbai alors que la star atterrit.
Manjha (41mn) est un court métrage indien en noir et blanc dur et très fort qui aborde le thème tabou de la pédophilie en Inde avec l’histoire d’un jeune garçon de Mumbai qui doit apprendre à survivre pour s’occuper de sa petite soeur.
Outre la bande annonce et une galerie de photos, cette copieuse édition Pathé se clôt avec deux clips vidéo Bombay Liquid Dance (3’) et Jay Ho Remix (6’).
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