Billy Taggart, un ancien flic reconverti en détective privé tente tant bien que mal de faire tourner son affaire. Le jour où l’homme le plus puissant de New York, le Maire lui confie la mission d’enquêter sur la supposée infidélité de sa femme, il est loin d’imaginer qu’il va se retrouver au coeur d’une vaste machination sur fond de campagne municipale.
Filmé en 2011, Broken city, réalisé en solo par l’un des frères Hugues (Menace II Society, From hell), débarque en France après son échec aux USA où le film a rapporté moitié moins que son coût de production.
Broken city ne manque pourtant pas d’intérêt sur le papier avec son pitch entre film politique et polar, son casting de luxe composé de Mark Walhberg, Russell Crowe et Catherine Zeta-Jones.
Un peu mou du genou, le récit manque cruellement d’ intensité dramatique jusque à sa dernière demi-heure, Broken city s’avère plaisant à défaut d’être captivant grâce à la prestation solide de Crowe et Walhberg qui font tous les deux le job (les rôles féminins manquent de consistance) et maintiennent l’intérêt pour cette histoire de corruption politique et de rédemption individuelle pour laquelle Allen Hugues a pris comme références les drames de Sidney Lumet des années 70/80 (Serpico, Le prince de New-York) et le Chinatown de Polanski. L’écriture s’avère trop lâche, des retournements de situation prévisibles et des aberrations scénaristiques (le privé joué par Walhberg découvre des preuves décisives dans une poubelle!) et la réalisation sans relief pour s’approcher de ces classiques et du récent Jeux de pouvoir (2009) avec le même Russell Crowe, bien plus passionnant dans le genre que ce Broken city néanmoins d’honnête facture.
L’avis de Manu Yvernault :
En 1991 sortait l’éclatant Boyz n the Hood. Deux ans plus tard, sous forme d’alternative plus violente sur le même thème, les frères Hughes, Allen et Albert, réalisaient Menace II Society. Suivra en 1995 Dead Presidents (Génération sacrifiée), sous estimé mais tout aussi puissant pour son regard critique sur l’Amérique et ses minorités, période post-Vietnam. Peu prolifique en 20 ans de carrière, 4 films, 1 documentaire, le duo « Hughes Brothers » se sépare enfin après avoir livré leur dernière réalisation commune, Le livre d’Eli.
Si leur collaboration était relativement efficace (From Hell fait également partie de leur filmographie) quand est-il de leur parcours solitaire ?
Sur le papier, Broken City pouvait créer un réel intérêt. Allen Hughes en solo, un casting alléchant ayant le profil de ce type de production. Et en bonus, un directeur de la photographie, Ben Seresin, à l’esthétique marquée, penchant blockbuster (Unstoppable, Transformers-la revanche).
Malheureusement, la faiblesse du scénario n’arrivera jamais à être rehaussée aussi bien par la qualité de la mise en scène, gentille et propre, que l’interprétation de son casting trois étoiles.
La faute principale à un enjeu totalement absent et une tension qui n’est absolument pas présente puisque les enjeux de l’intrigue principale sont dévoilés dès le début du film. Trop paresseux donc dans son écriture, Broken City n’arrive jamais à mettre pied à l’étrier pour se hisser au minimum aux côtés des « bons » films du genre. Un final bâclé achève frontalement l’édifice.
Si la faute peut être partagée, et non à part égales, entre réalisation et écriture, le casting, solide, Russel Crowe et Mark Wahlberg, fait de son mieux dans ce thriller politique, usé jusque que dans ses retournements de situations les plus improbables.
Pire, un sentiment de frustration ère tout du long quand on sent le potentiel qu’on aurait pu tirer de l’ensemble. Mais ici tout est cliché, lent, sans vraiment trouver de sens. De la banalité d’un film moyen, on verse au fur et à mesure vers de l’inconsistance cinématographique. Les personnages ne sont pas dirigés avec l’intérêt que le polar demande, les seconds rôles sont sous-traités, voire complètement laissés de côté. A vouloir être trop propre le film ne se salit jamais les mains et ne prend aucun risque ; en résulte un effet soporifique et le sentiment d’être passé à côté d’un métrage bien ficelé à défaut d’être transcendant.
A partir d’un scénario auquel personne ne croit et qui n’a à force que très peu de sens, Broken City s’inscrit finalement dans les films moyens où la mise en scène et le casting ne suffisent pas à sauver un naufrage déjà prévisible au travers son script.
En outre, Allen Hughes montre pour sa première envolée en solo qu’il maîtrise plus l’art de la mise en scène, carrée mais sans âme, que celui du récit. Prochain avis, Albert Hughes qui à son tour en solitaire prépare Motor City. A quand une reformation du duo ?