Quelque part en Argentine, cinq adolescents s’évadent d’un centre de détention pour mineurs. Déterminés à fuir même si la destination est incertaine, ils commencent une longue marche à travers la pampa. Ils tuent et pillent les rares personnes qu’ils rencontrent sur leur route, chassent pour se nourrir, se droguent pour s’oublier. Ils s’enfoncent dans un paysage de plus en plus hostile et accidenté et finissent par se perdre. Le groupe se disloque, et chacun devient une menace pour l’autre. La sauvagerie, jusqu’alors apanage des bêtes chassées, les contamine petit à petit…
L’avis de Manu Yvernault :
Premier film du cinéaste Alejandro Fradel après s’être essayé à quelques courts-métrages et de nombreux scénarios.
Si l’ensemble, par son économie de moyens, prend avant tout une valeur formelle, une certain sentiment de longueur s’installe au fur et à mesure du film. Le réalisateur semble en effet s’inspirer du cinéma de Rossellini ou de Bunuel mais n’apporte qu’une figure de fond plus qu’un intérêt formel.
On peut bien sûr s’extasier sur son esthétique très naturaliste, sa faculté à capter et mettre en scène une violence froide et dure de l’adolescence. Or, en posant un regard hâché, le film se découpe au fur et à mesure en « chapitres », représentés par le chemin personnel de chacun des protagonistes, il en perd également de sa valeur unitaire, celle de la première heure.
La rigidité dans laquelle le film prend place peut aussi lasser. Une tension aussi bien dans son ton que dans sa réalisation. Principalement filmé en courte focale et en plans très serrés, l’ensemble est finalement assez anxiogène.
Tel un road movie pédestre et rural, Los Salvajes s’enfouit au plus profond d’une violence, violence intérieure dont les personnages ne peuvent s’échapper. Cinématographiquement l’œuvre prend forme jusqu’à un final dérangeant et bluffant, mais le spectateur peut aussi être lassé, stoppé hors cadre et finalement peu impliqué dans le récit.
Ambivalence de la réussite d’une originalité désirée, et d’un ancrage proche d’un cinéma d’auteur assez individualiste. On apprécie le voyage comme une épreuve aride mais rare ou comme un labeur dont la dernière heure devient répétitive et s’épuise à force.
Difficile de purement rejeter le film, il est parfois d’une beauté attirante, mais l’honnêteté nous pousse clairement à mettre ce film entre parenthèses, par sa longueur, sa prétention et l’ennui qu’il procure au final.