Steve Butler, représentant d’un grand groupe énergétique, se rend avec Sue Thomason dans une petite ville de campagne. Les deux collègues sont convaincus qu’à cause de la crise économique qui sévit, les habitants ne pourront pas refuser leur lucrative proposition de forer leurs terres pour exploiter les ressources énergétiques qu’elles renferment. Ce qui s’annonçait comme un jeu d’enfant va pourtant se compliquer lorsqu’un enseignant respecté critique le projet, soutenu par un activiste écologiste qui affronte Steve aussi bien sur le plan professionnel que personnel…
L’avis de Manu Yvernault :
Gus Van Sant nous a habitué à l’alternance entre films personnels, intimistes et productions plus proches des commandes de studios.
Promised Land s’inscrit dans un tout autre contexte. Difficile de résumer les étapes de pré-production mais le film a subi de multiples réécritures. À l’origine, Dave Eggers et John Krasinski puis le scénario est passé de 4 mains (Eggers s’étant retiré du projet) à 6, Matt Damon et Drew Vinton, l’ancien colocataire de Damon à Harvard, ont pris le relais.
Puis en raison de problèmes de planning, Matt Damon qui cherche toujours à réaliser son premier film sur un sujet intimiste, laisse finalement la main à Gus Van Sant. On passe sur les détails comme la « pseudo » controverse politique quant à la production du film (une société basée à Abou Dhabi a participé au financement du film), en gros, gaz de schiste contre pétrole des émirats. Le débat, quand on connaît les détails, n’est plus ici. C’est l’ensemble de ses multiples détours de production qui ont sans doute contribué à son échec outre-atlantique.
Or, dans son intention Promised Land se veut avant tout un film militant et politique. L’ensemble de ses personnages humanisés à l’extrême sous l’œil de Gus Van Sant et de sa mise en scène dans sa plus simple expression, donnent une note presque documentaire et actuelle au film.
Si ce classicisme peut décevoir certains de la part du réalisateur, il suffit de poser le regard sur le propos et ainsi s’apercevoir que cette sobriété de mise en scène est là pour laisser toute la place à l’histoire et aux personnages. Pas d’exercice de style, simplement le savoir faire du réalisateur et de son chef opérateur.
Matt Damon comme à son habitude interprète son rôle avec une facilité et crédibilité de premier plan et livre un duel bien équilibré avec la prestation de John Krasinski.
Si on pouvait attendre plus de mordant à la vue du sujet énoncé, le film n’utilise que de rares raccourcis pour arriver à ses fins. Alors que le double twist final peut sembler un peu rapide, il n’en demeure pas moins la démonstration de ce que les scénaristes et le réalisateur ont tenté d’insuffler au film, spectacle et réflexion. Le seul bémol serait probablement cette tentation inexorable de toujours effleurer les clichés d’un genre sans tenter d’aller vers le noir profond, comme-ci, aussi indépendant soit-il, un film se devait de séduire un maximum de spectateurs par une note positive dans sa toute fin. Le propos en est quelque peu aseptisé alors que marquer plus les esprits aurait été bienvenu en tentant une autre approche avant le clap de fin.
Promised Land n’est alors qu’un film efficace et sa tête d’affiche toujours aussi douée dans chacun des rôles qu’il interprète. Si l’effet militant du film n’est pas recherché dans sa forme, un plaisir subsiste tout de même dans son fond.